Démocratie participative et Internet

Thèmes abordés

Démocratie participative, Internet, Conseil du Roi, e-administration, service-public.fr., dérives démagogiques, manipulation, ATTAC, Philippe Breton, idéal démocratique

Résumé du document

Le recours à la consultation dans l'action de l'administration n'est pas propre à l'ère moderne. Jaeger relève que « consulter est une pratique aussi ancienne que le gouvernement des hommes et des choses ». Sous l'Ancien Régime, le Roi s'entourait de conseils divers chargés de l'accompagner dans la conduite des affaires du royaume, en particulier le Conseil du Roi. Le développement des techniques modernes de consultation, motivé par la complexité croissante des sujets et par souci démocratique, date en revanche du XXème siècle.

Extraits

[...] Forme de consécration de ces évolutions législatives, l'article 7 de la Charte de l'environnement, dont la portée reste encore incertaine, consacre le droit à toute personne à participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement Ces dernières années les rapports entre les administrés et l'administration ont été facilités avec la mise en place d'une e-administration qui vise à rendre les services publics plus accessibles à leurs usagers avec des sites tels service-public.fr. Mais au-delà des aspects pratiques, certains pensent qu'Internet pourrait apporter bien plus dans les relations gouvernants-gouvernés. Apparu au milieu de la Guerre Froide à des fins militaires et scientifiques, Internet s'est imposé au grand public au milieu des années 1990 et compte aujourd'hui environ deux milliards d'utilisateurs dans le monde. [...]

[...] Les internautes s'évaluent mutuellement qu'à partir de ce qu'ils font, produisent et disent et non pour ce qu'ils sont (niveau de diplôme, catégorie socioprofessionnelle, notoriété, âge, sexe Cet outil leur permet d'avoir une parole qu'ils n'auraient normalement pas dans les médias traditionnels. Cardon prend pour exemple d'Étienne Chouard, professeur d'économie dans un lycée et blogueur à ses heures perdues, qui suite à un article ayant suscité l'intérêt d'ATTAC, s'est retrouvé comme une figure importante du Non lors de la campagne du référendum de 2005 sur le traité établissant une constitution pour l'Europe. Ce tableau idyllique d'une démocratie retrouvée est toutefois rapidement tempéré par les deux auteurs. [...]

[...] La masse d'informations présente sur le Net nous amène très souvent à nous sentir noyés et à nous en remettre très rapidement aux moteurs de recherche. Mais le sens échappe à Google, qui chiffre énormément sans jamais déchiffrer. C'est le mot dans sa matérialité stupide qu'il mémorise. Il reviendra toujours à l'internaute de trouver dans le foin des résultats ce qui fait sens pour lui. Or, les internautes ne cherchent des idées qui sont proches des leurs. Pour Philippe Breton, le culte de l'Internet implique finalement de renoncer aux conflits, aux oppositions, à la division, à la critique et aux jeux de pouvoir. [...]

[...] C'est le principal doute que nous pouvons émettre à l'encontre du vote électronique qui ne garantit pas une séparation des données nominatives des électeurs et des votes. De plus, ce système désacralise complètement et ôte le caractère solennel de se rendre dans les temples de la République que sont les écoles et les mairies le jour d'une élection. Les chances de réduire l'abstention sont certes probables, mais il serait regrettable de réduire l'effort citoyen à un simple clic. En dehors de ces questions d'ordre éthique et technique, quelle valeur accorder à ces e-votes ? [...]

[...] Quel sens donner à la participation sur Internet ? Philippe Cardon souligne que les inégalités qui se reproduisent sur le Net se retrouvent dans les formes de participation. Il y a en effet une différence abyssale entre participer via un I like sur Facebook et un article bien construit et argumenté. Après l'école, c'est finalement au tour d'Internet de reproduire les inégalités si l'on poursuit la réflexion de Bourdieu. Internet est ainsi victime du retour en force, dans son propre espace, des acteurs et des logiques dont il voulait s'affranchir à ses débuts. [...]