Dans quelle mesure la notion d'imposture est-elle intrinsèquement liée aux interactions sociales ?

Thèmes abordés

Imposture, interactions sociales, tromperie, mensonge, manipulation, persuasion, psychologie sociale

Résumé du document

Depuis toujours, dans l'arène de la vie sociale et politique, l'art de « faire croire » et l'imposture se jouent comme un spectacle complexe où les acteurs portent des masques et les spectateurs oscillent entre crédulité et scepticisme. Cet art subtil qu'est le « faire croire » dissimule la vérité en manipulant les perceptions et en créant un voile d'illusions tout en se cachant derrière le masque de l'imposture. Mêlant tromperie, manipulations et persuasion, il rend complexe la distinction entre le réel et le faux. Le « faire croire » est une modalité très commune dans le monde, il est au coeur même des relations humaines et des mécanismes de pouvoir. Mettant en jeu des enjeux variés et des mécanismes subtils, ces manoeuvres de faux semblants présentent cependant des limites. Les risques liés à l'échec et à la découverte de l'imposture sont nombreux, et dépendent des interactions sociales, qui peuvent doublement déterminer la validité de l'imposture ou entraîner son échec.

Extraits

[...] Mais Musset pousse les conséquences de l'imposture bien au-delà d'une simple mort sociale. Effectivement, le conflit entre Valmont et Merteuil et leurs vengeances respectives visant à dévoiler leurs impostures entraînera des conséquences légales mais sera aussi la cause de la mort de certains personnages l'imposture constante et poussée à son paroxysme de Valmont causera le délire puis la perte de sa bien-aimée Tourvel comme le suggère les paroles de la présidente sur son lit de mort « je veux le fuir, en vain, il me suit, il est là ; il m'obsède sans cesse » (p484). [...]

[...] En effet, le statut de femme prude de Merteuil dans la société traduit à la perfection que l'imposture dépend de la perception du sujet. Tandis que toute la société la perçoit comme tel, Valmont lui, complice de Merteuil, a la clairvoyance suffisante pour percevoir la réelle personnalité de cette femme. Cette perception du sujet est encore plus fragrante dans la lettre XXII, où la présidente de Tourvel victime de l'imposture de Valmont ne peut pas comprendre réellement la portée du discours qu'il lui tient dans sa lettre. [...]

[...] Pour être convaincant, l'imposteur se doit d'adhérer au personnage qu'il s'est forgé, et cela l'atteint dans ses profondeurs. Lorenzo est victime d'un mal profond, qui le ronge de l'intérieur et l'amène à perdre l'estime de sa propre mère, mais également l'estime de lui-même comme le suggère son monologue de l'acte IV « je n'ai plus été qu'une ruine, dès que ce meurtre, comme un corbeau sinistre, s'est posé sur ma route et m'a appelé à lui ». L'imposture nous montre ici que le prix à payer est très grave, il est cause d'un véritable mal être et d'une perte d'identité. [...]

[...] Enfin, Arendt qui aborde dans ses écrits le mensonge en politique montre dans « Du mensonge en politique » que l'imposture dépend de la manière dont le public perçoit les mensonges des politiciens. Le succès des politiciens dépend entièrement de la crédulité du public et de sa capacité à démêler la vérité de la tromperie. C'est pourquoi les spécialistes des relations publiques se préoccupent essentiellement des opinions. L'objectif étant l'image des Etats Unis ils sont constamment occupés à analyser et réaliser des scénarios « appropriés à chacun des publics ». [...]

[...] Le surnom affectueux « Renzino » prouve la réussite de son imposture qui est donc le résultat de relations sociales et mêmes interpersonnelles. Dans « LLD » de Laclos, Les interactions chasseur/chassé sont plus nombreuses et complexes dans la mesure où la personne trompée est également l'imposteur. C'est le cas notamment de Prévan, grand libertin, adroit et dangereux qui décida de s'attaquer à Merteuil. Comme le montre les propos de Valmont « c'est enfin aujourd'hui le seul homme, peut-être, que je craindrais de rencontrer sur mon chemin », il est un adversaire redoutable dans le monde du libertinage. [...]