Prétendre juger la culture des autres paraît discutable dans la mesure ou l'on pourrait nous reprocher de ne pas assez bien connaître pour pouvoir le faire. À l'inverse, qui mieux que moi serait à même de juger ma propre culture ? Je la connais forcément mieux que ceux qui appartiennent à une autre culture et il est donc légitime que ce soit moi qui puisse la juger aux mieux. Or le fait d'appartenir à cette culture ne risque-t-il pas cependant de m'empêcher de vraiment la juger ? En effet, appartenir à une culture, n'est-ce pas être dans une certaine relation affective avec elle ? Or tout jugement n'implique-t-il pas au contraire une certaine mise à distance ? Dès lors, comment pourrais-je la juger objectivement ? De plus, comment pourrais-je juger de la valeur de cette culture autrement qu'à travers les valeurs et les références qui sont les siennes et dont je suis imprégné ? (...)
[...] Ainsi, comme le fait remarquer Descartes, "il est bon de savoir quelque chose des moeurs des divers peuples afin ( . ) que nous ne pensions pas que tout ce qui est contre nos modes soit ridicule et contre raison" (Discours de la méthode). Une telle ouverture peut également nous montrer que nous connaissons sans doute moins bien notre culture que nous ne le pensions et peut nous permettre de la voir avec d'autres yeux, comme le suggère Montesquieu dans Les lettres persanes. Dès lors, ne faudrait-il pas toujours juger sa culture à l'aune d'une autre culture? [...]
[...] Puis-je juger la culture à laquelle j'appartiens? Prétendre juger la culture des autres paraît discutable dans la mesure ou l'on pourrait nous reprocher de ne pas assez bien connaître pour pouvoir le faire. À l'inverse, qui mieux que moi serait à même de juger ma propre culture? Je la connais forcément mieux que ceux qui appartiennent à une autre culture et il est donc légitime que ce soit moi qui puisse la juger aux mieux. Or le fait d'appartenir à cette culture ne risque-t-il pas cependant de m'empêcher de vraiment la juger? [...]
[...] Ainsi, je peux juger la culture à laquelle j'appartiens dans la mesure ou, étant au plus près d'elle, je suis apte à en saisir toute la valeur et toute les dimensions. Cependant, pour que mon jugement soit véritablement objectif, encore faut-il que je sois capable de vivre cette appartenance à cette culture particulière qu'est ma culture, autrement que comme un conditionnement. En effet, seule l'ouverture à d'autres cultures, laquelle témoigne de la présence en moi de la raison, pourra octroyer une véritable légitimité à mon jugement. [...]
[...] Ainsi, Nietzsche critique bien son époque ainsi que la culture elle-même et dénonce ses travers lorsqu'elle en vient à "étouffer" la nature. Cependant, ce jugement que chaque individu est censé pouvoir porter sur sa propre culture est-il pour autant objectif? L'objectivité ne suppose-t-elle pas au contraire un regard extérieur? Si la valeur d'un jugement tient avant tout à son objectivité, ne s'ensuit-il pas que l'on ne peut guère juger sa propre culture, à moins d'avoir pris ses distances avec elle? [...]
[...] Je dois en effet pouvoir m'interroger sur ma culture et être capable d'une certaine distance à son égard. par ailleurs, "être cultivé" ne signifie pas être l'homme d'une seule culture, mais être ouvert à la connaissance d'autres cultures. Or c'est justement cette ouverture aux autres cultures qui me permet de pouvoir véritablement juger ma propre culture. En effet, de même que l'introspection permet d'acquérir une grande connaissance de soi à condition d'y associer la médiation du regard d'autrui, de même pour juger une culture, il faut pouvoir la connaître du dedans et du dehors, autrement dit lui appartenir tout en étant capable de la voir d'un point de vue extérieur. [...]
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