Ce texte pose la problématique mise en évidence par Bodin, de l'indivisibilité de la souveraineté, dans son principe et dans son objet, c'est à dire si la souveraineté est une dans son essence en ce qu'elle regroupe la « volonté générale », et une dans son objet en ce qui concerne les différentes puissances que l'on peut dénombrer, à contre-pied de la théorie de la séparation des pouvoirs. Cette conception d'indivisibilité est récurrente dès le XVIème siècle avec l'apparition de la monarchie absolue, qui est animée de l'ambition d'exercer directement son pouvoir sur l'ensemble de la société. Pour autant, Rousseau se détache de ces conceptions, par la contestation des théories de séparation de souveraineté et par la vision novatrice d'une souveraineté indivisible, fondement d'une théorie politique
[...] On peut ainsi se rapporter à Bodin qui considère qu'un Etat duquel la souveraineté comme absolue et indivisée serait ôtée ne serait plus un Etat. Une opposition à la théorie libérale de la souveraineté La phrase : tantôt ils confondent toutes ces parties et tantôt ils les séparent recoupe la division jusqu'alors entre les partisans et adversaires du partage de la souveraineté. Rousseau se place en marge de ces deux conceptions. La critique contenue dans ce texte peut sembler être dirigée contre Montesquieu et sa théorie de la séparation des pouvoirs. [...]
[...] Il déclare ainsi que l'erreur est d'avoir pris pour des parties de cette autorité ce qui n'en était que des émanations Les droits qu'on prend pour des parties de cette souveraineté lui sont tous subordonnés, et supposent toujours des volontés suprêmes dont ces droits ne donnent que l'exécution Pour bien comprendre ce passage du Contrat Social, il faut se rappeler la définition de la souveraineté : il y a dans l'Etat une force commune qui le soutient, une volonté générale qui le dirige cette force, et c'est l'application de l'une à l'autre qui constitue la souveraineté Ce texte tiré du Manuscrit de Genève fait ainsi une distinction entre la force et la volonté, ou plus exactement entre la force publique et la volonté générale On serait tenté de croire que la souveraineté résulte de l'union des deux et que par conséquent elle est à la fois force et volonté. Mais en ce cas, la souveraineté devient un composé. [...]
[...] Conclusion Pour conclure sur ce chapitre de l'indivisibilité de la souveraineté, il faut retenir une chose. C'est que Rousseau entend dire tout ce qui doit etre et non pas ce qui est. Son système confie la législation à l'assemblée populaire, à l'Ecclésia de l'Antiquité aux Landsgemeinde des cantons suisses : Rousseau a projeté sur le plan de l'éternel les institutions de la minuscule république de Genève Même sans considérer les risques de dérapage, il était évident qu'elle était en elle même inapplicable, telle quelle, dans le contexte historique de la révolution. [...]
[...] Pour sauvegarder la liberté de la tyrannie il est nécessaire de limiter la souveraineté, et le meilleur moyen de la limiter est encore de la partager. Le gouvernement de Sparte et la constitution anglaise pour l'époque moderne en constituent pour lui les meilleurs exemples. Telle est la théorie des gouvernements mixtes qui a joué dans l'histoire des institutions un rôle très important, puisque Jefferson lui même s'en serait inspiré pour rédiger la première constitution américaine. Rousseau : un absolutiste ? [...]
[...] La souveraineté est émiettée en quotes parts personnels, mais pour la souveraineté dans son entier, il faut assembler toutes les parcelles de souveraineté individuelle, et donc convoquer l'ensemble des citoyens. A la différence de Montesquieu qui raisonne sur les gouvernements établis, et espérait sauver la monarchie en préservant à la fois les intérêts particuliers de la noblesse et les droits légitimes du peuple, Rousseau condamne toute représentation nécessairement corruption de la volonté souveraine originaire : la volonté du peuple. De cette conception découle l'utilisation des instruments de la démocratie directe : le suffrage universel et le réferendum. [...]
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