La connaissance est-elle nécessaire à l'art ?

Résumé du document

Au XXe siècle, l'émergence du design de produit et la difficulté de l'identification de sa nature révèlent un immense paradoxe pour le public. En effet, il fait apparaître deux aspects qui semblent inconciliables : d'une part, sa matérialisation dans la réalisation d'objets fonctionnels, comme du mobilier, destinés à l'utilisation de l'acheteur et nécessitant de ce fait une connaissance de la matière par l'artiste ; d'autre part, le fait qu'il se revendique comme relevant de l'art, c'est-à-dire le besoin de voir reconnaître ses productions comme oeuvres d'art, utilisant comme argument l'idée qu'il s'y trouve une recherche sémantique.
Cela interroge la relation entre art et connaissance. L'oeuvre d'art, fréquemment identifiée comme produit esthétique né de la main de l'homme, et faisant sens pour le public qui y trouve une signification profonde, se targue généralement d'échapper à toute règle que se serait imposé l'artiste : elle serait la réalisation pure d'un esprit qui n'y aurait mis aucune connaissance particulière, animé de sa seule intention. Pourtant, l'idée que l'art demande une connaissance, voire qu'il n'y a pas art sans connaissance, vient bousculer cette considération.

Extraits

[...] Ainsi, le génie est incapable d'indiquer comment il donne naissance à son produit, puisque cette faculté dépasse l'homme qui le possède. Il est donc incapable de transmettre une connaissance qu'il ne sait pas lui-même. En ce sens, l'art ne relève pas de la connaissance ; nulle règle permet à un homme de donner naissance à une oeuvre. Vouloir légiférer dans ce domaine est une imposture, car l'artiste n'en est un qu'en tant qu'il puise dans son intériorité sa force créatrice, et n'en est plus un s'il obéit à toute forme de connaissance qui lui aurait été transmise. [...]

[...] Il ne fait que réaliser ce qui semble beau à la multitude et aux ignorants. De ce fait, non seulement il pèche par défaut de science, mais en plus il trompe le public qui le croit savant. B. L'art en tant que beaux-arts ne s'apprend pas D'une autre manière, l'art et la connaissance se doivent d'être distingués. Il s'agit avant tout de reconnaître les différents types d'arts qui existent, afin de voir dans quelle mesure la connaissance entre dans ce domaine. [...]

[...] En effet, ce moment n'en demande pas moins essentiellement à être formé et éduqué par la pensée, de même qu'il nécessite une réflexion sur le mode de sa production ainsi qu'un savoir-faire exercé et assuré dans l'exécution. En effet, l'un des aspects principaux de cette production est un travail extérieur. Il est nécessaire d'acquérir un savoir-faire, et ce, par la réflexion, l'application et une pratique assidue. Cela est indispensable pour que l'artiste se rende maître du matériau qu'il utilise dans la réalisation de son oeuvre. [...]

[...] En revanche, il n'est plus question d'art dès lors qu'un tableau, une sculpture, etc. sont produits en série, à l'identique. Les productions de l'activité artistique sont donc de bien plus grande ampleur que celles de l'activité artisanale, du fait qu'elle consiste essentiellement en une activité spirituelle. Il y a un état d'inspiration nécessaire dans la réalisation d'une oeuvre d'art, inspiration qui par sa nature même ne procède d'aucune connaissance. B. Pour autant, un savoir-faire est nécessaire Pourtant, envisager l'oeuvre d'art comme l'oeuvre d'un esprit très singulièrement doué, c'est se fourvoyer. [...]

[...] L'art requiert ainsi une connaissance, sans laquelle il ne pourrait s'exprimer. Cependant, si seule la connaissance pouvait donner lieu à l'art, tout le monde pourrait être artiste, pour peu qu'il ait la science nécessaire. Or, l'artiste ne l'est que par son caractère singulier : ainsi, art et connaissance sont deux domaines qui se doivent d'être distingués. II. L'art ne relève pas de la connaissance A. L'artiste prétend connaître, mais imite l'apparence Si l'on s'intéresse à l'objet représenté par l'artiste, et en particulier le peintre ou le poète, le domaine de l'art se trouve bien éloigné de la connaissance. [...]