D'après Saint-Just, « Ce qui produit le bien général est toujours terrible ». Que penser de cette citation? Comment la comprendre? En quoi est-elle aujourd'hui encore d'actualité?
Pour comprendre la citation, il faut tout d'abord savoir qu'il l'écrivit pendant la Révolution française et plus particulièrement pendant la Terreur (dont il fut l'un des principaux instigateurs en participant au Comité de Salut public). On comprend mieux la position politique du personnage: il tient à ce que des institutions fortes soient mises en place et, pour cela, il est prêt à éliminer « tous les ennemis de la République ». Pourtant, en regardant les écrits de Saint-Just, il apparaît que sa position ne fut pas toujours aussi radicale. Il est en effet contre l'usage de la force et de l'oppression. Pour lui tout système politique basé sur des lois (lois qui ne peuvent être garanties que par le recours à la force) ne peut que s'écrouler Le système qu'il souhaite construire reposerait sur la loi sociale (basée sur l'amitié et l'amour, par opposition à la loi politique) mais en attendant, il faudrait peut-être employer la force pour mettre ce système en place, ce qui est contradictoire.
La citation nous indique que le passage de l'Ancien régime, où ni l'expression de la volonté générale ni celle de la volonté individuelle ne sont libres, à un nouveau régime basé sur le contrat social ne peut se faire sans heurts, sans peur et qu'une fois que ce régime est en place, le bien général ne se produit pas à la légère, sans faire de concessions.
Nous sommes donc en droit de nous interroger sur la définition du contrat social et de ses implications; sur risque de dérive autoritaire inhérent à tout gouvernement et enfin sur l'existence ou non d'une production du bien général qui ne soit pas terrible.
[...] Mais, en réalité, si le pacte enlève des droits naturels aux hommes, il leur garantit leur liberté parce que la volonté générale assure la sécurité de chacun. Néanmoins, ce pacte ne reste justifiable que tout pendant que la volonté générale en demeure réellement une ; c'est à dire que la volonté générale doit émaner de la volonté de tous pour s'appliquer à tous[4]. Ces deux théoriciens du contrat social montrent que dernier n'existe que parce qu'il a une raison d'exister. [...]
[...] Néanmoins, sa citation ne donne plus - dans le sens original du mot terrible - une vision complète de la situation actuelle. En effet, la production du bien général n'est plus forcément terrible mais elle peut au contraire être à la base d'un sentiment d'appartenance à une communauté, à un sentiment d'utilité des citoyens ainsi que nous le montre le tout récent livre de Pierre Rosanvallon La contre démocratie[14]. Sources A report on the surveillance society, by the Surveillance Studies Network, September 2006. [...]
[...] Ainsi, ce qui produit le bien général est toujours terrible demeure d'actualité. Cependant, on peut se demander si le mot terrible ne peut pas aujourd'hui être envisagé dans son sens familier, c'est à dire à l'opposé d'effrayant, de mauvais. En effet, si la production de bien général peut certes être terrible, elle peut également être très bénéfique. C'est cette production de bien général qui peut unir une société, la lutte contre la pollution en est un exemple. Les gouvernements se sont récemment saisis du problème à la suite du rapport Stern. [...]
[...] Les mesures prises au Royaume-Uni sont toutes autres, même si elles ne sont pas non plus sans conséquences. La société britannique est en effet qualifiée de société sous surveillance une grande partie des mouvements, des actions des citoyens est contrôlée par caméra. De plus, le débat sur l'introduction d'une carte d'identité pour les citoyens britanniques a provoqué de nombreux remous. En effet, plus que son risque faire diminuer les libertés, ses détracteurs reprochent au gouvernement britannique de ne pas être assez clair sur les raisons justifiant cette mesure[9]. [...]
[...] De plus, si la production de bien général par les gouvernements n'est pas toujours problématique, ils n'en sont pas les seuls auteurs. La société civile, quoi qu'on en dise se mobilise de plus en plus. Le réseau associatif est en plein essor et il stimule ainsi l'action des gouvernements et assure un rôle de contre pouvoir. L'association Greenpeace est dans le domaine de l'environnement un bon exemple de contrôle avec par exemple leur victoire sur l'Etat français en ce qui concerne le démantèlement du porte-avion Clémenceau en Inde. [...]
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