Éminemment subjective, souvent imperceptible, l'idée du bonheur est propre à chaque individu et a largement varié dans le temps. Cette impression de contentement, de félicité que le bonheur procure n'est que trop rare et, la plupart du temps, ne peut s'apprécier a contrario. La religion a apporté sa propre définition du bonheur, le plaçant au centre de ses préoccupations. Avec plus d'ampleur que toute autre religion, le christianisme a représenté le bonheur sous la forme d'un Jardin des délices, d'un Eden merveilleux, d'un paradis perdu (...)
[...] En étant aujourd'hui institutionnalisé, le bonheur devient normalisé et réducteur d'espoir. L'institutionnalisation du bonheur répond à la reconnaissance et à l'intégration des loisirs dans la société dont ils deviennent la composante majeure. Les loisirs ne sont pourtant pas une révélation du XXe siècle et des congés payés : ils ont toujours été liés à l'activité humaine et correspondant à un besoin de détente, de partage, de réflexion ou d'activités multiples. Souvent religieuses et en liaison avec la nature (moisson, solstices), les fêtes étaient de ce fait intégrées à la société comme un rite auquel tout le monde participait. [...]
[...] L'idée de bonheur dépend aussi de l'environnement culturel offert à l'individu. Sous l'Ancien Régime, dans une société dominée par l'Église, la pauvreté et la souffrance devaient conduire au bonheur dans l'au-delà, alors qu'aujourd'hui, la notion de bonheur liée à la société de consommation conduit au tout, tout de suite Mais, outre ces distinctions entre les bonheurs selon les époques et les nécessités de chacun, il y a lieu de distinguer le bonheur souhaité, préexistant, et le bonheur vécu, prédominant : il y a toujours préexistence du bonheur rêvé, qui se traduit par la quête d'un idéal et qui contribue à façonner l'homme imaginaire d'Edgar Morin. [...]
[...] Cette normalisation du bonheur, qui tend plus à répondre au besoin de se situer dans la société vis-à-vis des autres qu'à correspondre aux désirs de chacun, correspond-elle à la réalité ? Un bonheur source d'envie peut-il encore être qualifié de bonheur ? Créateur de besoins, il peut conduire, notamment les jeunes, à un certain désespoir. Du mythe du bon sauvage, heureux car sans contraintes, à notre contemporain dont le bonheur peut sembler institutionnalisé, l'individu s'approprie constamment une idée - fluctuante - du bonheur. Aujourd'hui le bonheur n'est plus transcendant et il revient à l'homme seul d'accéder au bonheur. L'individu ne peut avoir une idée que très personnelle du bonheur. [...]
[...] Le bonheur individuel se devrait de respecter l'autre. Ainsi, le choix de la limitation des vitesses sur la route et la controverse que cela suscite pose le problème : le bonheur des uns (rouler à 200 km/h) peut provoquer le malheur des autres La recherche du bonheur passe donc nécessairement par des limites institutionnelles. Le bonheur individuel peut aussi se retrouver dans le bonheur collectif, c'est d'ailleurs ce que certaines idéologies ont cherché à faire accepter. On retrouve tout d'abord cette moralisation de la recherche du bonheur pour la mettre au service de la société dans le catholicisme : respect des pauvres, amour du prochain, acceptation de sa situation sociale et de ses souffrances doivent permettre l'accès privilégié au paradis, et confirment l'impression que le bonheur n'existe pas sur Terre. [...]
[...] Dispenser le bonheur sous forme de tranquillité est un devoir pour lui. Chaque ordonnance royale commence par les mos suivants : Le roi s'adresse à ses sujets dont il a toujours voulu le bonheur Si le roi assure le bonheur de ces sujets, cela implique en retour que ses sujets lui doivent fidélité et amour. La Révolution française, quant à elle, veut instaurer une société plus juste et plus à même de proposer à tous, pauvres et nobles, une part de bonheur. [...]
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