« Là où l'homme cultivé voit un effet artistique, l'homme sans culture attrape un rhume ». Cette citation d'Oscar Wilde met avant une idée intéressante : l'homme cultivé jouirait d'un double privilège sur l'inculte. D'une part ses connaissances lui dévoilent la beauté des oeuvres et, d'autre part, cette familiarité avec certaines oeuvres le rend sensible à la beauté des produits de la nature. Inversement l'absence d'éducation artistique coupe l'accès non seulement au sens des oeuvres mais aussi à la beauté visible dans la vie quotidienne. La culture semble alors indispensable à l'homme pour qu'il puisse avoir accès à une expérience du beau. Cette idée met en avant plusieurs notions : avant tout celle d'un goût artistique que détiendrait l'homme cultivé, ensuite celle d'un apprentissage possible de ce goût, apprentissage qui comprend nécessairement l'idée de concept. Enfin cette culture du beau aboutirait à une évolution de celle-ci, et qui remet en question l'idée d'universalité. Pourtant dans l'expression « sens de la beauté », le mot « sens » fait référence aux sensations, aux sentiments. Peut-on réellement apprendre à un homme à ressentir une sensation ? La beauté est-elle une affaire de culture, d'un évolution ou alors d'universalité ? (...)
[...] Seule l'esthétique peut être universel sans concept. Et cette universalité rejette toutes les thèses qui parlent de culture du beau, d'homme cultivé ou d'inculte vis-à-vis d'une œuvre d'art. Chaque homme peut vivre une expérience esthétique, peut ressentir le beau grâce à ses facultés que sont l'imagination et l'entendement. Il n'y a donc aucune science du beau car le jugement de goût n'est pas déterminable par des principes. Dans le paragraphe 60 de La critique de la faculté de juger Kant insiste sur le fait qu'il existe une manière pour créer une œuvre d'art, mais en aucun cas une méthode. [...]
[...] Le beau est ce qui est universel et sans concept. [...]
[...] Il s'agit de l'antinomie du goût. Cette antinomie met en avant le fait que le jugement de goût est un jugement par sentiment mais un jugement auquel les autres doivent nécessairement adhérer. Seulement en réalité il n'y a pas de contradiction entre les deux thèses : en effet si l'on prend garde au fait qu'il y a deux sens différents du mot concept, les deux thèses peuvent être vraies en même temps. En fait le jugement de goût doit se rapporter à quelque concept par nécessité. [...]
[...] C'est ainsi que le goût peut se développer et se confirmer. Le plus bel exemple est l'art contemporain qui est souvent très peu apprécié du grand public, pensant pouvoir faire les mêmes œuvres, à cause de son manque de culture. Voilà comment nous aboutissons à un élitisme du goût : les experts et les critiques d'art se révèlent avoir meilleur goût et ils jugent le beau de telle sorte que leurs jugements ont une valeur universelle. Ainsi donc l'universalité du beau ne serait pas réelle, elle serait plutôt imposée par un groupe minoritaire. [...]
[...] Mais en fait le sens du beau n'est soumis à aucune connaissance, aucun concept de l'entendement. Il est universel et à la fois sans concept. Cela ne signifie cependant pas que la culture n'est pas en relation avec le beau. La notion de sens du beau passe par l'existence d'un jugement de goût et ce goût est fondé sur une culture où l'on retrouve le sentiment moral. Ainsi le sens du beau se cultive, effectivement, mais cependant toujours sans évolution du beau et sans connaissance. [...]
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