« La condition d'une véritable création est la destruction de l'image d'une pensée qui se présuppose elle-même », affirme Deleuze, dans son ouvrage Différence et répétition.
Cette pensée qui « se présuppose », c'est bien celle qui crée des clichés, des images préconçues, produits de l'intelligence fabricatrice, et qui nous emprisonnent. Nous sommes pris dans un environnement culturel et social, nous avons un vécu qui conditionne nos jugements et nous pousse à formuler des opinions ; au fond, nous ne savons apprécier une œuvre qu'en émettant des critiques.
Mais il ne s'agit pas de « comprendre » une œuvre d'art, auquel cas il y faudrait un « décodeur », c'est-à-dire des formes, des images, des représentations, et donc forcément des clichés, sans lesquels nous ne pourrions l'appréhender.
Il semble au contraire que l'art en général révèle une spontanéité, une manifestation dénuée de toute préformation de l'esprit, et aurait un effet libérateur sur notre manière d'appréhender le monde.
Dès lors, comment l'art peut-il nous délivrer des opinions ou des « clichés » ?
Dans la réponse à cette question, il s'agira d'analyser la spécificité de l'acte de création artistique et ce qu'il implique autour de lui, prenant notamment pour fil directeur la philosophie deleuzienne de l'art.
[...] Comment l'art peut-il nous délivrer des opinions ou des clichés ? La condition d'une véritable création est la destruction de l'image d'une pensée qui se présuppose elle-même affirme Deleuze, dans son ouvrage Différence et répétition. Cette pensée qui se présuppose c'est bien celle qui crée des clichés, des images préconçues, produits de l'intelligence fabricatrice, et qui nous emprisonnent. Nous sommes pris dans un environnement culturel et social, nous avons un vécu qui conditionne nos jugements et nous pousse à formuler des opinions ; au fond, nous ne savons apprécier une œuvre qu'en émettant des critiques. [...]
[...] Ainsi dans la peinture de Francis Bacon, il y a destruction de toute identité organique. l'organisme n'est pas la vie, il l'emprisonne Bacon peint des corps sans organes, le fait intensif du corps Il effectue une destruction totale de toute notion de forme : les corps subissent des déformations, et s'expriment à travers un système de forces et d'agencement des affects corporels. La notion de corps sans organes agit comme une libération des codes corporels ; le corps n'est plus organisé, il y a ainsi destruction totale de toutes les illusions liées à l'art pensé comme représentatif. [...]
[...] La création trace son chemin entre des impossibilités, et c'est la violence de la sensation qui détruit tout cliché. Toute création crée une zone d'indétermination : elle est violente car elle m'arrache à toutes mes certitudes. Ainsi, le génie créateur kantien crée par l'imagination des règles nouvelles à la fois involontaires et intransmissibles, insaisissables (Critique de la faculté de juger). L'art est donc un commencement inconscient, qui se passe de tout présupposé : un champ transcendantal, d'immanence radicale ; un champ de forces qui s'empare de la pensée ; c'est l'expérience du non pensé dans la pensée. [...]
[...] Mais bien plus, il semble que par l'art, nous puissions aussi entrer en nous-mêmes : l'art aurait cette capacité de défaire nos opinions, et de faire ainsi exploser notre propre identité. L'art est un composé de sensations, un bloc d'affects et de percepts qui a une consistance pré-objective et qui, par conséquent, se passe de tout vécu subjectif, c'est-à-dire de toute opinion. Il n'y a pas un sujet déjà donné qui viendrait critiquer selon des modèles, des modes de pensée et des critères bien définis. [...]
[...] L'art contemporain introduit ainsi la tradition de l'innovation permanente, il est donc en lui- même un commencement, et se passe de tout ce préexiste à lui, de présupposés, d'opinions. Ainsi, le Ready made existe car on décide de le doter d'une charge esthétique symbolique et de le faire ainsi entrer dans le monde de l'art. Par cette révolution, Duchamp met à mort la beauté, l'Idée et la forme platonicienne du beau en soi, comme idée d'un art qui imite et doit ramener à une forme essentielle. Les Ready made sont situés au-delà de la beauté et de la laideur ; ils prennent donc leur source hors des clichés. [...]
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