Selon la mythologie grecque, l'homme, le plus démuni des animaux, a reçu de Prométhée le feu de la civilisation; depuis, l'homo faber transforme la nature par une activité utile ou gratuite, par la technique ou l'esthétique.
L'art est la production artificielle d'un objet à partir de la matière: l'art est imitation de la nature par le mortel, intermédiaire entre les bêtes et les Dieux. L'art est une ruse, un trompe-l'œil de Zeuxis, un reflet du créateur, un miroir de l'homme, une réflexion du moi: l'art renvoie à son créateur et au spectateur sa propre image de lui-même. Le problème est donc la réflexion du miroir: dans quelle mesure l'art est-il miroir de l'homme? Est-ce que l'histoire de l'art se confond avec l'histoire humaine? La confrontation des notions d'art et conscience crée une tension: l'art est apparaître alors que l'homme est être.
L'enjeu de notre questionnement est donc de déterminer les limites de ce reflet.
Notre cheminement s'articule autour de trois axes de réflexion: d'abord, l'art est un miroir de l'humanité, c'est-à-dire de l'identité de la communauté humaine; puis, l'art est un miroir de la subjectivité, c'est-à-dire de la singularité du moi; enfin, l'art est un miroir de l'Humanité, c'est-à-dire de l'universalité de l'étant.
[...] Il est exemplaire car il crée les propres règles de l'art. Cet enthousiasme du au don, talent naturel, cultivé par le travail infini de la matière afin de la maîtriser parfaitement est une inspiration divine. Ce n'est plus l'artiste qui crée, c'est Dieu lui-même qui s'infiltre en lui, c'est la parcelle de divinité inhérente à l'homme qui s'exalte, c'est le démon de l'homme qui se manifeste pleinement. Ainsi, l'homme a vocation à l'universalité, et l'art est le miroir de cette universalité tant cherchée. [...]
[...] Dans cette perspective, l'artiste est celui qui nous enferme dans l'apparence de la Caverne et nous attache aux chaînes de l'illusion; l'artiste est l'anti- philosophe qui doit être banni de la cité. Platon l'oppose dans La République au philosophos qui nous délivre et nous mène sur le chemin de la dialectique ascendante jusqu'à la contemplations des Formes du monde intelligible et de la trilogie platonicienne: Beau-Bien-Vrai. Ainsi, l'art est une double apparence de la vérité, une supercherie, une tricherie. Pourtant, l'art est propre à l'homme. [...]
[...] Mais, ce désir refoulé tend à revenir à la conscience sous forme de substituts ou ersatz. C'est ainsi que Toulouse-Lautrec, infirme, représente à merveille des cavaliers, et compense ainsi son handicap. L'artiste est un introverti qui frise la névrose et qui crée afin de sublimer ou compenser ses désirs et se consoler de la réalité. L'œuvre est dans cette perception une revanche sur la vie, l'expression d'un manque qui cherche à se combler. Pourtant, cette approche réductionniste et négative de l'art comme revanche est fortement critiquée par Nietzsche qui le conçoit comme l'expression d'un grand désir, d'un trop plein. [...]
[...] L'homme a un pouvoir de représentation et de symbolisation. C'est ainsi que l'homme prend figure dans les tableaux: La Joconde est une humanisation de la Madonna particulièrement significative. L'artiste s'intéresse aux mœurs et critique les comportements sociaux: Les deux amants placent l'homme et la femme au centre du tableau et des préoccupations, mais le petit chien symbolise la fidélité tandis que le miroir est désormais présent dans l'œuvre même. Ainsi, l'artiste joue avec son œuvre, avec le spectateur et avec lui- même. [...]
[...] Dans cette perspective, celui qui a du goût c'est celui qui n'a pas de goût mais qui apprécie simplement la beauté en elle-même. La communion du spectateur et de l'œuvre manifeste de cet appel à l'universalité dont chaque être, chaque conscience est vouée. De plus, l'artiste cherche à atteindre le modèle humain: la statue de Polyclète qui respecte les proportions du canon et l'idéal du nombre d'or ou encore les proportions de De Vinci montrent que l'artiste ne cherche pas à représenter un homme mais plutôt à modéliser l'homme. L'art est donc le miroir de l'Humanité, c'est-à-dire de l'Homme. [...]
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