Précaire, le pont retient l'attention du passant, parce qu'il crée un nouvel espace en unifiant deux lieux. Il n'est pas entre-deux ni au milieu, mais est bien à l'origine de la nouvelle économie du visible qui s'instaure. Son architecture imposante (arches et piliers) n'efface pas l'abîme mais le défie. Il fait émerger un nouveau lien, en convertissant le regard du spectateur à une autre réalité. Ainsi, il n'est pas étonnant que le philosophe Heidegger se soit appuyé sur l'exemple du pont pour cerner la relation entre le bâtir et l'habiter. Heidegger tente de dégager ce qui fait l'être du pont dans une série de réflexions afin de comprendre les transformations que celui-ci met en œuvre. Il s'appuie sur le terme allemand bauen qui signifie édifier un bâtiment en vue d'y habiter. Bâtir et habiter s'incluent donc dans une perspective fondatrice. Certes, on n'habite pas le pont, même si on peut y coucher (dessus ou dessous), on ne fait que passer sur cette passerelle de l'éphémère destinée à aménager un espace.
[...] Cette victoire a sonné le début de la retraite autrichienne. Le western spaghetti de Sergio Leone est sorti en 1967, mêlant le genre de la commedia dell'arte à une mythologie américaine revisitée. Signalons que Sergio Leone tenait à cette explosion du pont, qui a quand même blessé un caméraman lors du tournage de la scène. HEIDEGGER, Essais et Conférences, p.189. KANT, Qu'est-ce que s'orienter dans la pensée éditions Flammarion p.57. HEIDEGGER, Essais et Conférences, p.173. On se réfère évidemment au titre de son ouvrage Chemins qui ne mènent nulle part, éditions Gallimard HEIDEGGER, D'un entretien de la parole in Acheminement vers la parole, éditions Gallimard p.97. [...]
[...] On conteste son existence, il est objet de litige, chaque belligérant se l'approprie pour pouvoir mener à bien ses desseins. Le pont, l'habitat et le lieu Heidegger traite de l'exemple du pont pour montrer la proximité qui se dégage entre le bâtir (bauen) et l'habiter, car le bâtir est un faire bâtir pour que les gens habitent un lieu. Le pont rassemble, resserre les mortels dans un lieu, il est l'élan créateur qui réunit ce que Heidegger appelle les divins et les mortels il est concrétisation d'une orientation. [...]
[...] Il reliait le quartier bosniaque et le quartier serbe. Les obus ont achevé méthodiquement ce pont qui a disparu pour laisser place à une frontière politico-religieuse. La brisure du pont (il ne s'est pas effondré tout de suite) a signé la rupture induite par la guerre civile. Le pont prolonge la rencontre des mortels, il se constitue plutôt comme un pôle discret d'organisation de la vie. On ne séjourne pas sur un pont, on est en transit, on s'achemine vers un autre lieu. [...]
[...] Ce dernier devient d'ailleurs l'obsession du colonel nordiste qui accepte de les enrôler. Ce colonel alcoolique leur déclare le non-sens de cette guerre, vu le peu d'importance de ce pont, une chiure de mouches sur les cartes de l'état-major leur assène-t-il. La prise de ce pont est considérée comme une victoire décisive, favorisant le repli de l'ennemi. Certes, le colonel n'est guère convaincu par cette stratégie, il n'empêche que tous les jours, nordistes et sudistes se bombardent de chaque côté du pont. [...]
[...] L'habitation traverse toute la pensée de Heidegger, pour qui la métaphysique occidentale s'épuise et s'achève, laissant place à une philosophie de l'Être accompagnée d'une nouvelle mystique poétique. La philosophie se préoccupe d'édifier une maison de l'Être : tous les textes de Heidegger sont traversés par des chemins qui ne mènent nulle part[18] (Holzweg), des chemins de campagne (Der Feldweg) où une simplicité et une chaleur s'opposent à l'aménagement urbain d'une métaphysique orgueilleuse en quête d'une maîtrise technique toujours plus forte. [...]
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