Dans ses Méditations métaphysiques, Descartes choisit de remettre en question l'ensemble des connaissances qu'il a acquises, appliquant un doute caractérisé d'hyperbolique sur l'ensemble de ce qu'il croyait, jusqu'ici, savoir. Plusieurs hypothèses successives lui permettent d'invalider l'ensemble de ses croyances, dont il ne peut affirmer avec certitude qu'elles sont vraies : il pourrait avoir été trompé par ses sens, induit en erreur par un songe ou par la folie, ou encore, trompé par un malin génie qui, s'étant glissé dans son esprit, en aurait troublé le discernement.
[...] Pourtant on peut se demander s'il n'y a pas chez l'être humain une forme de conscience innée, qui se caractérise notamment dans la conscience qu'on semble avoir du juste, du bon, de la peine d'autrui, et qui, même s'ils s'éduquent, sont des sentiments dont on pourrait avoir l'intuition qu'ils existent chez l'homme, même le moins éduqué. On parle de « conscience morale », de « conscience politique », on utilise souvent l'expression « avoir la conscience tranquille » pour désigner la conviction de n'avoir rien fait de mal. On peut donc se demander s'il n'y a pas une forme de conscience élémentaire, une notion innée chez l'homme du bien et du mal. [...]
[...] » La capacité de réunir les différentes perceptions sonores, visuelles, olfactives, que nous recevons, sous un concept n'est pas innée : nous apprenons à maîtriser ces concepts, parfois en faisant erreur. Ainsi la conscience de notre faculté subjective d'analyse du monde qui nous entoure, et la conscience même que nous avons du monde qui nous entoure (une conscience elle-même subjective, en tant qu'elle détermine nos perceptions sous un angle subjectif, car linguistique), s'apprennent et ne semblent pas choses innées. En ce sens on apprend des autres, par l'éducation, à être conscient du monde et de nous-mêmes sur le même mode (linguistique) que ceux qui nous l'enseignent. [...]
[...] En effet, il semble à Rousseau que la commisération naturelle, chez l'homme sauvage qui n'a pas le recul et la prudence de l'homme « civilisé », est plus importante, et il est prêt à « se livrer étourdiment au premier sentiment de l'humanité ». D'où pourrait venir qu'un tel sentiment de pitié soit inné chez l'homme ? D'après Rousseau, il viendrait de ce que la préservation de l'espèce, qui chez l'homme dépend largement de l'association des hommes en une société solidaire, dépend de ce sentiment premier de bienveillance qui, permettant aux hommes de ne pas se nuire les uns aux autres, leur permet de vivre et de s'associer, de progresser ensemble. [...]
[...] En ce sens, un apprentissage plus personnel, voire une expérience ponctuelle et métaphysique mènent à une forme de conscience de soi plutôt théorique que pratique. Il peut être intéressant de se demander dans quelle mesure ces deux formes de conscience de soi son liées, voire dépendantes. En effet, tous les apprentissages pratiques que nous recevons de la société, et de notre expérience quotidienne de l'autre, ne sont-ils pas nécessaires à l'expérience métaphysique, à la réflexion de soi ? Descartes ouvre ses Méditations métaphysiques en précisant qu'il se croit en âge et en mesure de prendre suffisamment de recul pour aborder correctement les questionnements qu'il s'apprête à soulever. [...]
[...] En d'autres termes, sans doute notre apprentissage pratique est-il un prérequis à la possibilité même d'un questionnement théorique au sujet de notre conscience, à la possibilité d'une expérience de nous-mêmes en tant que sujet. [...]
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