Comment un système moral peut-il prescrire deux actes antithétiques, binairement opposés? L'éthique Hindou adopte une position ambiguë quant à la violence, tantôt rejetée en faveur d'ahimsa, la non-violence, tantôt sublimée, comme les livres épiques le Ramayana et le Mahabharata en témoignent. Le système moral Hindou semble ainsi pivoter autour de la dichotomie violence/non-violence, à travers un processus de redéfinition, de légitimation et de justification complexe.
Ce processus est particulièrement visible à travers la tradition védique: il est donc légitime de se baser en priorité sur la tradition védique afin d'expliquer comment cette redéfinition prend forme. Comment la tradition védique surmonte-t-elle la contradiction logique qui naît de l'obligation ontologique simultanée de violence et non-violence? La retranscription du problème moral posé dans ce contexte permet d'éclairer la structure morale de la tradition védique, soit le lien entre la théorie de la bonne conduite et la théorie de la valeur. En d'autres termes, la violence est-elle obligatoire en vertu d'un but intrinsèquement bon, ou le but acquiert-il sa valeur en fonction de la violence ?
[...] En latin, ordo, l'étymologie du terme ordre a pour premier sens ligne droite ce qui souligne le caractère secondaire de l'ordre. De même, Ahimsa est souvent définit négativement, non-violence ou non-mal; ahimsa est donc l'« absence de elle est secondaire. De nombreux exemples dans la mythologie Hindou souligne la primauté du désordre. Ainsi, Chandraguptu est considéré comme l'unificateur de l'Inde, et ce grâce à de nombreuses conquêtes, violentes (Boesche, Roger : 2003). L'ordre, l'unification, naît alors de la violence, naît du désordre originel. [...]
[...] Par exemple, Rama dans le Ramayana combat les Rakshasas, personnages dont on ne peut définir s'ils sont humains ou pas tant ils sont décrits péjorativement. Il mène cette bataille pour permettre à l'ordre de revenir dans la forêt, afin que les Rishis puissent méditer en paix (Rao, Srinivasao: 1970). Néanmoins, cette violence là est, elle aussi, règlementée, idéalement. Les Lois de Manou énumèrent de nombreuses circonstances dans lesquelles la violence est proscrite, en temps de guerre (Doniger, Wendy and Brian K. [...]
[...] Ambiguïté de la place de la violence dans l'Ethique védique Comment un système moral peut-il prescrire deux actes antithétiques, binairement opposés ? L'éthique Hindou adopte une position ambiguë quant à la violence, tantôt rejetée en faveur d'ahimsa, la non-violence, tantôt sublimée, comme les livres épiques le Ramayana et le Mahabharata en témoignent. Le système moral Hindou semble ainsi pivoter autour de la dichotomie violence/non-violence, à travers un processus de redéfinition, de légitimation et de justification complexe. Ce processus est particulièrement visible à travers la tradition védique : il est donc légitime de se baser en priorité sur la tradition védique afin d'expliquer comment cette redéfinition prend forme. [...]
[...] Ainsi, lorsque Manou : énumère les quatorze cas qui donnent lieu à danda, la violence se trouve parmi eux. Par peur de danda, chacun accomplit son Dharma, créateur d'ordre, c'est-à- dire d'harmonie. Le mot dharma est difficile à traduire. Néanmoins, sa relation avec l'ordre reste certain, dharma porte, soutient (dhar) le cosmos, le tout organisé Dharma englobe les rites et la morale : à travers les obligations rituelles de chacun, l'ordre est maintenu, et le bien est produit. Ainsi, les sacrifices permettent l'ordre entre le cosmos et le monde, tout en étant le reflet de l'ordre, de la stratification sociale, car chacun joue un rôle bien particulier dans le rituel. [...]
[...] Même lorsque la violence est nécessaire pour maintenir cet idéal de cohésion et d'ordre, elle est extrêmement réglementée et est redéfinie en non-violence, comme si le système éthique Hindou rejetait le fait de devoir utiliser la violence pour atteindre le bien ultime, l'ordre. Cette tension est omniprésente. Cependant, le dharma des Ksatriyas reste la guerre : La guerre est la loi éternelle des rois (Yodha Dharma Sanatanah, Manou 98). Et la guerre n'est pas redéfinie comme ahimsa. Comment justifier cette violence ? [...]
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