Le bonheur… éternelle quête humaine, qui comme un bateau, tend à chavirer au fil des souffrances, de la maladie et des conditions extérieures. Ne soyons pas hypocrites, la recherche du bonheur occupe une place prépondérante au sein de notre courte existence. Au quotidien, nous recherchons l'extase, la béatitude et la félicité de l'âme. Certes, nous recherchons notre propre satisfaction… Mais qu'en est-il de celle des autres, de ceux que nous côtoyons quotidiennement ? A vrai dire, dans la course que représente le bonheur, nous songeons principalement à notre petit intérêt individuel et non à celui des autres. Pourtant, nous pourrions nous demander si, d'un point de vue moralisateur, nous n'aurions pas plutôt le devoir de faire le bonheur des autres. Ai-je donc le devoir de faire le bonheur des autres ? Cette question cruciale, met en jeu ici une conception éthique et vertueuse du bonheur. Le mot devoir nous percute de plein fouet… En effet, personne ne m'interdit de ne pas faire le bonheur des autres, et a priori le bonheur s'avère une recherche strictement individuelle. Or, faire le bonheur des autres représente dans son sens le plus large, à contribuer, à participer de manière active au bien-être collectif, ainsi que de s'y impliquer réellement. Ma présence est alors annoncée comme celle d'un créateur, d'un prophète qui aide les autres dans leur quête au bonheur. Une présence donc nécessaire et indispensable. Cependant, peut-on vraiment faire le bonheur des autres si nous ignorons comment ils le conçoivent et quelle est l'essence de ce bonheur? Le bonheur est-il vraiment accessible ?
Ne pas faire le bonheur des autres relève de l'égoïsme, de l'individualisme, de la jalousie ou de la perfidie, tandis que devoir le faire semble strict et formel. Peut-on trouver un juste milieu ? Sans aller jusqu'à faire le bonheur des autres, ne doit-on pas au moins leur vouer le respect, le dévouement et la considération, au sein d'une société juste et harmonieuse ? Quels problèmes se posent pour faire le bonheur des autres ? Si la maxime nous interpelle, n'est ce pas parce que devoir faire le bonheur des autres est l'apogée, le paroxysme de la moralité ?
[...] De multiples embûches sont parsemées sur le chemin de l'accès au devoir de faire le bonheur des autres. Cependant, ne pas tenir compte de la présence des autres est inconcevable, et notre égoïsme n'a d'utilité que s'il fait fonctionner la société et les échanges constatent Kant et Smith. L'homme est d'ailleurs voué à une maturation et une évolution de sa raison ainsi que des ses dispositions, ce qui l'entraîne inéluctablement à bâtir une société harmonieuse, où le respect de chacun, où la morale, la justice et le droit prédominent. [...]
[...] Avoir le devoir de faire le bonheur des autres n'est donc pas tout a fait véridique et cohérent si l'on ignore ce qu'est le bonheur pour telle ou telle personne. De par le fait, nous apercevons distinctement que le problème de la subjectivité s'annonce difficilement surmontable. Notre cheminement philosophique est parsemé d'embûches et cela n'est point encore fini. Car effectivement, nous pouvons méditer sur la dimension métaphysique et potentiellement illusoire du bonheur. Selon certains penseurs, le bonheur n'est pas réellement accessible à l'homme, il se situe principalement dans le domaine de l'illusion et du noumène Le bonheur n'est que passager et ne domine pas la vie humaine, suggère Pascal, qui s'effraie de ces espaces infinis Qu'adviendra-t-il de nous après la mort ? [...]
[...] En somme, celui qui ne voit que son pauvre petit bonheur individuel s'enferme dans sa propre prison, et regrette de ne pas avoir plutôt cherché à faire le bonheur de l'humanité, ne serait-ce que par un simple geste qui aurait entraîné un bien-être universel. Faire le bonheur des autres a une valeur morale tellement absolue Ne pas le faire serait bien dommage, encore plus sans réflexion. Le bonheur individuel n'a finalement que très peu de portée, et il est dénué de sens s'il ne s'accompagne pas des autres. [...]
[...] C'est alors qu'il découvre le devoir, la morale, le respect indispensable d'autrui. Mais l'idéal de Saint-Exupéry ou de Rousseau ne nous conduirait-il pas à faire, par delà le respect des autres, leur bonheur ? Le dessein de l'évolution de la morale n'est-il pas de devoir faire le bonheur des autres ? Il se pourrait que faire le bonheur des autres puisse augmenter le bonheur de tout le monde, dont le mien, c'est pourquoi le recours à la pensée de Mill peut nous être tout à fait lucratif. [...]
[...] Or, si le bonheur est inconnaissable ou inabordable, je n'ai pas à première vue, le devoir de faire le bonheur des autres. De plus, la recherche du bonheur est le plus souvent exclusivement personnelle, et force est de constater que nous ignorons, la plupart du temps, le contentement des autres ou leur malheur. A ce propos, Bergson écrivait On mettrait bien du temps à devenir misanthrope si on s'en tenait à l'observation d'autrui. C'est en notant ses propres faiblesses que l'on arrive à plaindre ou à mépriser l'homme Un certain égoïsme en effet nous incline à sourire quand la vie nous est facile, à mépriser le malheur des autres quand notre joie est à son pinacle. [...]
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