L'initiation scolaire aux activités artistiques s'effectue ordinairement sous le titre d'un apprentissage aux activités d'éveil ; dans ce cas il s'agit moins d'instruire l'enfant et de le soumettre à une discipline inhabituelle que de laisser s'exprimer et s'épanouir spontanément en lui sa sensibilité et son imagination. Pour cela on lui fait découvrir à travers des jeux les rapports de couleurs, mais aussi de formes qui sont à la base de la peinture et de la sculpture.
Est-ce à dire que la peinture et la sculpture mais aussi la poésie et la danse sont en elles-mêmes des activités ludiques ? D'un côté, elles semblent s'exercer de manière libre et finalement gratuite à la manière d'un jeu, mais d'un autre côté elles semblent exiger pour parvenir à cette liberté un apprentissage et une assimilation forcée. Ainsi, on voit la difficulté qu'il y a à classer l'activité artistique en général dans un genre déterminé.
[...] Le travail artistique met donc en question l'idée même que nous faisons d'un travail. C'est aussi pourquoi l'activité artistique est difficilement classable. Elle n'est pas un jeu même si elle s'en rapproche par certains aspects, elle n'est pas non plus un travail même si elle comporte du travail. Il ne faut pas non plus affirmer qu'elle est à la fois un jeu et un travail : d'une part parce que ce serait contredire, mais d'autre part parce que ce serait faux. [...]
[...] Le peintre n'est à priori contraint par aucune norme du point de vue de la couleur ou de la forme. C'est ce qui fait dire à Kant dans la Critique de la faculté de juger que dans l'art s'éprouve le libre jeu de l'imagination ce qui vaut de la peinture vaut aussi de l'écriture d'un roman, que le romancier peut placer à l'époque où il le désire, ou un lieu qui n'a jamais existé et qui n'existera peut être jamais. [...]
[...] Ne faut-il pas une maitrise technique et celle-ci ne suppose-t-elle pas un long travail d'assimilateur et d'appropriation ? On voit que pour ces deux raisons au moins il y a quelques difficultés à identifier l'activité artistique et le jeu. II. L'activité artistique comporte du travail sans être un travail Est-ce à dire que l'activité artistique est un travail ? D'une part, il apparait indéniable que l'activité artistique requiert un long effort dont l'œuvre finale n'est que l'aboutissement ultime. Il y a le libre jeu de l'imagination, mais encore faut-il concrétiser ce libre jeu par la possession et la maitrise des moyens qui permettent de concrétiser ce jeu. [...]
[...] Considérer l'activité artistique comme un jeu peut conduire à n'y voir qu'une activité dépourvue de profondeur et de sérieux. Or, sous l'apparence d'une forme de divertissement et d'activité recréatrice, l'art manifeste et possède une profondeur de pensée. Ainsi, voir un tableau d'Arcimboldo donne l'impression que le peintre s'est assuré en laissant joué son imagination, mais qui ne s'agit la que d'un exercice sans enjeu. Or, au-delà de cette apparence, le spectateur peut aussi être amené à s'interroger sur le statut qu'Arcimboldo donne à l'être humain. [...]
[...] Le signe de cette spécificité est que l'activité artistique n'obéit à aucune des contraintes sociales qui sont celles du travail : pas d'horaires fixes, pas de rémunérations en contrepartie des heures passées et finalement pas d'utilité sociale. Il faut donc reconnaitre une certaine incapacité à désigner adéquatement l'activité artistique. L'intérêt de cette activité sur le plan philosophique est de nous conduire à nous remettre en question la pertinence des notions mêmes de travail et de jeu pour qualifier ce que les hommes font de leurs temps. Ainsi, il n'est pas sûr que si l'activité exercée ne puisse pas être rangée sous la catégorie du travail, elle soit pour autant un simple jeu. [...]
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