Croyance en la conscience morale, nature de l'homme, William Golding, société humaine, mythe de l'anneau de Gygès, contrainte divine, malhonnêteté de l'homme, sens moral inné, recherche du bonheur
"Assis au milieu d'eux, couvert de crasse, la chevelure emmêlée et le nez sale, Ralph pleurait sur la fin de l'innocence, la noirceur du coeur humain et la chute dans l'espace de cet ami fidèle et avisé qu'on appelait Porcinet", déplore William Golding après l'assassinat sauvage du meilleur ami de Ralph, héros de Sa Majesté des mouches. De fait, seuls rescapés d'un accident d'avion, des enfants tentent de survivre sur une île déserte, constituant une société avec des règles, des normes. Très vite cependant, ce retour à l'état de nature rousseauiste dégénère, ne laissant plus place qu'à la loi du plus fort. Ces enfants, normalement considérés comme des êtres innocents, sont-ils le reflet du caractère foncièrement mauvais de l'homme ? Mettent-ils en évidence l'absence chez celui-ci d'une conscience morale ?
En effet, posséder une conscience morale, attribut essentiel de l'homme, c'est être capable de juger chaque action sous le critère du bien et du mal. Le quidam proclamera presque toujours agir dans le but du premier, au nom de son sens moral, inné, donc. Mais Golding dévoile dans son roman une toute autre essence de l'homme : il serait radicalement mauvais. Alors, la connaissance morale est-elle innée ? Est-il raisonnable de faire confiance, d'espérer en sa conscience morale propre ou en celle d'autrui ? Peut-on l'acquérir ? A-t-on raison de croire en une conscience morale ?
[...] Peut-on se fier à une telle conscience morale ? III- C'est par la raison que l'homme doit se forger une conscience morale, en laquelle on peut croire. En effet, l'homme est capable, du fait de sa raison, d'autonomie : il peut élaborer de lui-même une maxime universelle propre à guider ses actes en vue du bien. Kant, dans les Fondements de la Métaphysique des Mœurs, explique que la maxime, la loi universelle, est une loi que tout homme peut penser, consistant en ce qu'il serait souhaitable qu'elle soit appliquée par tous. [...]
[...] Or, il apparaît certains cas où, précisément, l'homme fait preuve d'une conscience morale innée. II- Parce que l'homme peut faire preuve d'une conscience morale innée, il est concevable d'avoir confiance en celle-ci. Il apparaît en effet que certains interdits sont communs à toutes les civilisations, points mis en avant tant par des philosophes comme Voltaire (pourtant peu enclin à l'optimisme quant à l'homme) que par des ethnologues comme Claude Lévi-Strauss. Cette coïncidence marque une conscience morale propre à tout homme. [...]
[...] Sans l'autre, sans la contrainte extérieure qu'il représente, je n'aurais pas pensé mon acte moralement, preuve s'il en est que la conscience morale n'est pas innée. Aussi l'homme n'est-il pas capable, quand bien même il manifeste une quelconque conscience morale, d'éprouver naturellement celle-ci : elle est le résultat d'une pression extérieure. Dès lors, on peut affirmer que l'homme est naturellement sans foi ni loi, et l'on peut s'imaginer un monde sans aucune contrainte extérieure salvatrice : l'homme se laisserait aller à l'exercice de sa force pour dominer autrui avant que celui-ci ne le domine, comme le vante Calliclès dans Gorgias de Platon. [...]
[...] Il séduit la reine, tue le roi, prend sa place, et invente plus tard la monnaie, vecteur de plaisir et souvent de mal. De fait, ayant obtenu le pouvoir de faire le mal en toute impunité, Gygès n'a obéi qu'à l'appel du bonheur : la conscience morale, en apparence présente chez lui, s'est dissipée dès qu'il a eu l'occasion de faire le mal. Elle n'était finalement qu'un déguisement. Ainsi, l'homme ne mène une vie morale que parce qu'il est soumis à des contraintes extérieures le poussant à contrarier sa nature fondamentalement mauvaise. [...]
[...] C'est donc par l'exercice de sa raison que l'homme peut faire preuve d'une conscience morale digne de confiance. De fait, la conscience morale étant, plus que le propre de l'homme, son essence, il est nécessaire à ce dernier de la développer pour être heureux. En effet, le propre de l'homme, c'est sa raison, raison qui, nous l'avons vu dans le paragraphe précédent, est apte à rendre infaillible la conscience morale. Aristote, dans le livre I de l'Éthique à Nicomaque, affirme que le bonheur est le Souverain Bien, le bien que l'on poursuit pour lui-même et pour lequel on poursuit d'autres biens. [...]
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