Philosophie générale, notion de préjugé, affirmations intuitives, jugement, idées reçues, clichés, stéréotypes, connaissance rationnelle, corruption de la raison, point de vue épistémologique
Comme toujours, plutôt que de partir de théories philosophiques particulières, ou d'affirmations intuitives (le préjugé est mauvais, il est dangereux, il est immoral…), il faut partir d'une définition "technique" qui distingue le préjugé des notions voisines (idées reçues, clichés, stéréotypes, erreurs, faute...) et des notions opposées (jugement), qui envisagent les différents usages du mot, et qui puissent correspondre à différents exemples de préjugés.
[...] Mais la volonté d'imposer une pensée sans lieu, car sans préjugés (une pensée qui ne tire ses jugements que d'elle-même) est problématique, car il est difficile d'imaginer une pensée qui ne corresponde à aucune perspective particulière. L'idée d'une émancipation par rapport à tous les préjugés, suppose la possibilité d'une pensée objective, valable en tout temps et en tous lieux, l'existence d'un point de vue « neutre ». Mais l'existence d'un tel point de vue n'a rien d'évident et sa remise en cause menace l'idée d'une émancipation des préjugés. Par exemple, essayer de comprendre une époque historique passée, c'est toujours la comprendre à partir des représentations de l'époque présente. [...]
[...] Il faut faire attention à la construction et éventuellement à l'étymologie des mots (ATTENTION toutefois : ni la construction ni l'étymologie ne peuvent prendre le pas sur le sens courant ou philosophique des mots, et très souvent elles sont totalement inutiles pour la définition, mais parfois, comme ici où il y a plusieurs mots très proches, elles permettent de spécifier la notion). Le « pré-jugé », c'est littéralement ce qui est déjà jugé. C'est donc à une antériorité du jugement que renvoie la notion de pré-jugé. On retrouve l'étymologie latine du mot, praejudicare, qui renvoie au fait de « juger préalablement ». [...]
[...] Philosophie générale : la notion de préjugé I. Analyse de la notion Comme toujours, plutôt que de partir de théories philosophiques particulières, ou d'affirmations intuitives (le préjugé est mauvais, il est dangereux, il est immoral il faut partir d'une définition « technique » qui distingue le préjugé des notions voisines (idées reçues, clichés, stéréotypes, erreurs, faute . ) et des notions opposées (jugement), qui envisagent les différents usages du mot, et qui puissent correspondre à différents exemples de préjugés. Attention à ne pas « moraliser » tout de suite la notion : il y a des exemples de préjugés jugés immoraux (un préjugé raciste ou sexiste, disant que les étrangers ou les femmes sont inférieurs aux hommes ou aux indigènes, par exemple), mais il y a aussi des exemples de préjugés qui ne paraissent pas forcément immoraux (le préjugé selon laquelle la terre est plate, ou selon lequel les signes astrologiques déterminent le caractère individuel, etc.). [...]
[...] D'une part, le préjugé est presque toujours dénoncé comme un mal : il serait source d'erreur, de danger, de vice, etc. Parce qu'il suppose un comportement fondé non sur l'exercice de l'esprit critique et de la raison individuelle, mais sur la répétition non critique de jugements passés, le préjugé est critiquable d'un point de vue épistémologique et même moral. (Nous avions laissé ce constat de côté pour ne pas le laisser biaiser le processus de définition, mais nous pouvons maintenant le prendre en compte comme une thèse influente qui mérite l'examen). [...]
[...] Ainsi, d'un côté le préjugé apparaît comme une forme nocive de jugement, une corruption de la raison, et de l'autre, il semble le « raccourci » indispensable et précieux qui nous permet de penser, de parler et d'agir, sans être paralysé et débordé par l'infinité des jugements grâce auxquels nous vivons. Le préjugé est-il un mal nécessaire pour la pensée ? Par ailleurs, une difficulté apparaît clairement quand on considère le projet consistant juger sans recourir à aucun préjugé. En effet, même si je ne peux renoncer à juger de tout sans préjugés, je peux au minimum tenter de m'astreindre à juger de certaines choses (les plus essentielles) sans préjugés. [...]
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