Philosophie au Moyen Âge, héritage du judéo-christianisme, phénomène de société, Platon, Aristote, christianisme, Grecs, idée de création
Il nous faut maintenant continuer notre réflexion en tentant de comprendre la façon dont le christianisme change profondément l'itinéraire philosophique poursuivi jusqu'à maintenant. L'Occident naît entre autres de la rencontre entre la culture grecque et la culture juive christianisée. Le christianisme forme un ensemble de pratiques, de croyances et de pensées originales par rapport autant aux traditions de la culture juive, grecque que romain.
[...] L'événement est bouleversant, car nous assistons ici à la naissance d'une religion qui échappe du cadre culturel dans lequel elle est née. Les stoïciens avaient déjà développé une philosophie de type cosmopolitique qui refusait de penser que l'humanité de l'homme se définissait par quelque appartenance que ce soit à une Cité ou à un Empire. Cette façon de procéder avait quelque chose d'inouï pour l'époque. Pour Platon ou Aristote, il est assez clair qu'être un homme, c'est appartenir toujours à un groupe donné, à une Cité donnée. [...]
[...] Cela valait-il vraiment la peine qu'il le soit ? On ne parviendra plus dans ces conditions à ne pas poser la question de la valeur de l'existence et de sa finalité. Avec l'idée révolutionnaire de la personne comme unique et irremplaçable, la culture chrétienne découvre donc aussi la contingence de l'existence, l'événement du mal qui doit être expliqué, la question du sens et de la valeur de cette vie. Si la vraie vie est à venir et échappe aux lois de ce monde, quel est le sens de la vie ici-bas ? [...]
[...] Ce qui fait l'excellence de l'homme, c'est la raison et la raison est d'emblée universelle. On n'est pas homme tout seul. La question de l'autre homme ne se pose pas chez les Grecs. Le christianisme intervient dans cette problématique en renversant la problématique. Il met en évidence que chaque être humain est unique. Mais cette mise en évidence s'accompagne de l'ouverture d'un nouveau sens de l'intersubjectivité. Si je suis digne d'être appelé enfant de Dieu, tout homme est digne d'être appelé enfant de Dieu. [...]
[...] Elle va aussi modifier l'appréhension que le sujet a de sa propre existence et du sens de celle- ci. Chez les Grecs, on ne se pose pas principalement la question de savoir si l'existence a une valeur et une direction. Le sens de l'existence, chez les Grecs, c'est son essence et sa direction et sa valeur consistent en ce que cette existence s'accomplit. Les philosophes s'opposent seulement sur ce qui dans les actions de l'homme est digne de l'existence excellente, mais ils semblent au moins s'accorder sur le fait qu'être est un bien. [...]
[...] On n'aurait jamais vu au temps des Grecs un esclave changer de condition sociale ni un marchand se demander si cela vaut la peine d'être marchand, ce que signifie être marchand pour lui par rapport au sens de sa destinée métaphysique. Il était marchand et il avait à l'être excellemment. Cela ne peut plus être tout à fait le cas avec le christianisme. Il faut s'imaginer ce que pouvait signifier une conversion au temps des premiers chrétiens, c'est-à-dire le risque d'une rupture sociale, une sortie du groupe, ce qui était presque inconcevable à l'époque. III. La raison et l'événement Un nouveau rapport de la raison à l'événement change aussi les données du contexte interrogatif philosophique. [...]
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