Le mot « expérience » a dans la langue française deux sens :
Il désigne d'une part un savoir-faire acquis par la pratique. En ce sens, on parle d'une expérience professionnelle ou d'une expérience de la vie. Pour ce sens, les Allemands disent « Erfahrung » et les Anglais disent « experience ». Cette expérience donne une connaissance empirique (du grec emperia qui veut dire expérience). La connaissance empirique est une connaissance tirée du vécu, acquise par la pratique.
Il désigne d'autre part la vérification d'une hypothèse par une observation provoquée volontairement. En ce sens on parle d?une expérience de physique ou de chimie ou bien on dit « tenter l'expérience ». Pour ce sens, les Allemands et les Anglais disent « Experiment ». Cette expérience donne une connaissance expérimentale. La connaissance expérimentale exige un protocole scientifique. Il faut d'abord formuler une hypothèse précise, puis la vérifier dans un contexte à l'abri de toute perturbation extérieure.
Qu'elle soit empirique ou qu'elle soit expérimentale, l'expérience doit établir une relation entre une règle générale (donc abstraite) et des faits observés (donc concrets). Dans le cas de la connaissance empirique, on part d'une ou de plusieurs observations et on en tire une règle générale. L'observation y précède donc la loi. Dans le cas de la connaissance expérimentale, on part de l'hypothèse d'une loi et on veut la confirmer ou la réfuter par l'observation. La loi y précède l'observation. L'information recueillie par l'observation est reçue passivement ; la règle générale est produite par l'action de l'esprit. Le paradoxe de la notion d'expérience est donc qu'elle est à la fois réception d'un donné observé et production d'une loi générale, elle est donc à la fois passivité et activité (...)
[...] On ne peut la justifier ni par la logique, ni par l'expéérience. D'un point de vue logique, le raisonnement inductif n'est pas justifiéé. Il n'y a aucune contradiction logique àà ce que le soleil ne se lèèvera pas demain, mêême si, jusqu'àà préésent, il s'est levéé tous les jours. Pour le premier navigateur àà franchir le cercle polaire pendant les solstices, le soleil ne s'éétait pas levéé le lendemain, soit parce qu'il ne s'éétait pas couchéé soit parce qu'il restait couchéé. [...]
[...] C'est pourquoi le deuxièème paragraphe de la Critique de la raison pure commence par la formule :"Mais si toute notre connaissance déébute AVEC l'expéérience, cela ne prouve pas qu'elle déérive toute DE l'expéérience, car il se pourrait bien que mêême notre connaissance par expéérience fûût un composéé de ce que nous recevons des impressions sensibles et de ce que notre propre pouvoir de connaîître (simplement excitéé par des impressions sensibles) produit de lui-mêême". Comment l''expéérience déépasse-t-elle l''observation ? Pour l''empirisme, l'expéérience est la seule source de notre connaissance des faits, mais elle ne nous garantit aucune certitude quant àà l'universalitéé et àà la néécessitéé des relations qu'elle éétablit entre les faits. Les idéées se lient toutes seules selon des lois méécaniques d'association. Hume, qui a lu Newton, a voulu appliquer la thééorie de l'attraction universelle au domaine de l'esprit. [...]
[...] L''un fera de cette activitéé de la penséée mathéématicienne l'expéérience de ariditéé, de austééritéé et de contrainte; l''autre en fera l'expéérience de la gratuitéé, du ludique, et de la libertéé. L''expéérience du travail mathéématicien, est donc une expéérience trèès personnelle. "Chat ééchaudéé craint l'eau froide". Le proverbe a beau mettre en garde contre les géénééralisations abusives de l'expéérience, chacun tirera de ses expéériences la leççon qui s'inscrit dans son projet de vie. L'expéérience n'a pas toujours raison dans ce qu'elle affirme. Elle ne dit que ce lui fait dire. Mais si elle ne dit rien par elle-mêême, elle vaut surtout par son pouvoir de contredire . [...]
[...] C'est pourquoi les leççons de l'expéérience ne sont pas universelles. Chacun fait ses propres expéériences, et chacun en tire une leççon personnelle. C'est l'expéérience qui affine notre perception et qui constitue le tissu de notre vie intéérieure. En un certain sens, nous sommes ce que nos expéériences ont fait de nous et ce que nous avons fait de nos expéériences. C'est pourquoi Husserl dit que "toute expéérience peut êêtre éétendue en une chaîîne continue d'expéériences singulièères explicatrices, unies synthéétiquement en une expéérience unique, ouverte àà l'infini, du mêême." (Expéérience et jugement 8). [...]
[...] Descartes part de l'éépreuve du doute radical. Il veut douter de tout, de tout ce qu'il sait, de tout ce qu'il pense, de tout ce qu'il perççoit. Mais il y a une chose dont il ne peut douter : il est obligéé d'affirmer l'existence de sa penséée parce que pour douter de l'existence de sa penséée, il faut penser (c'est le céélèèbre "je pense donc je suis"). En déécouvrant la certitude de l'existence de sa penséée, il déécouvre aussi quelle est sa nature : d''une part elle ne peut réésister àà l'éévidence de la vééritéé et d''autre part il y a en elle un certain sens du parfait puisque pour douter, elle éétait capable de trouver des imperfections dans son savoir. [...]
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