Existe-t-il une folie de l'action ?

Thèmes abordés

action, folie

Résumé du document

Le terme de folie est ambivalent. Cette aliénation de l‘identité subjective recouvre trois usages qui recoupent trois valeurs : une valeur neutre (terme d‘ordre médical pour désigner cette aliénation), une valeur négative (le fou est celui que l‘on rejette pour se confirmer dans notre sens) et une valeur positive (on s‘ouvre à des sources mystérieuses d‘inspiration en poésie ou dans le cadre du surréalisme par exemple).

Il y a alors un paradoxe, véritable monstre logique, car l‘action se veut avant tout raisonnable. Quel sens donner à cette formule ? Elle fait sens dans la bouche de celui qui rejette l‘action ou encore dans l‘activisme. La folie peut elle-même être le sujet de l‘action en tant qu‘il n‘y a pas d‘action sans une dimension de folie : folie constitutive de l‘action.

Extraits

[...] Les justes ou Les mains sales). L'activisme est une frénésie de l'action, ce qui compte n'est pas la finalité mais le fait d'être inséré dans l'action. En ce sens, l'activisme est misologique : il hait la raison, il hait la question du sens qui serait liée à une terrible angoisse de la réflexion. L'activiste a peur d'être seul et de réfléchir : il est un homme de l'action directe (jeu de mot sur le groupe terroriste « Action Directe » : pour terroriser, l'action doit être aveugle, doit frapper n'importe où n'importe quand, mais pas de pause sinon la question du sens se pose. [...]

[...] Si il y a une folie dans l'action, jusqu'où l'assume-t-on ? Quelles en sont les limites ? Pour agir, il faut savoir être fou. Mais quel est ce savoir du savoir être fou ? III/ Savoir être fou : comment ? Jusqu'où ? Le plus grand risque est l'illusion d'échapper au risque La prudence est vertu car l'action est risque : on veut minimiser le risque de l'action par une décomposition logique de l'action (projet, moyen/détermination des moyens, exécution) l'action ne se pense pas sans la multiplication de protocoles cognitifs à caractères scientifiques, on parle en ce sens de suprématie de la technique, et nous nous entraînons à ces protocoles techniques. [...]

[...] Cela peut également être un cas pathologique, une figure de la mélancolie : incapacité à agir, on ne peut rien initier. En ce sens, celui qui voudrait faire une valeur de son incapacité à agir rechercherait simplement un alibi pour son impuissance, pour cette inertie pathologique. On constate alors une illégitimité du propos, d'autant plus qu'action et contemplation sont parfois complémentaires : par la délibération, on se demande si notre action peut venir s'insérer convenablement dans le monde. Formule fait sens au sens de passion de l'action : l'activisme La formule « être fou de » peut aussi se concevoir comme « être passionné de ». [...]

[...] Si nous pouvons agir, c'est parce que nous sommes corps, corps sensible, qui appartient au monde et qui éprouve le monde : il est le point de réflexion du monde. Pascal, à travers l' « esprit de finesse », évoque l'aspect intuitif qui permet à l'Homme de comprendre et d'interpréter à partir d'une vision synthétique (ex : lorsque l'on écoute un discours, on l'entend dans sa globalité, pas besoin de décomposer chaque mot). Or si l'action est un discours et qu'on dispose d'esprit de finesse, l'action a un sens pour celui qui a le sens de la vie. [...]

[...] Or l'action n'est telle qu'en tant qu'elle intègre le réel sous toutes ses formes : l'action tient compte de la réalité (légèreté de la folie/gravité de l'action, je tiens au monde alors que les représentations font souvent du fou quelqu'un qui danse, se sent léger, s'envole) et prend en compte les opinions, les mœurs. Il existe un jugement critique (délibération) qui consiste en un effort de conscience de ses propres limites Il n'existe pas de prise de conscience de soi en dehors de l'agir, car l'action a deux vertus essentielles : la fermeté du vouloir (persévérance) et patience. Or la folie est l'impossible maîtrise de soi, la folie est velléité. La folie se déploie entre deux pôles : extrême instabilité de l'humeur ou psychorigidité extrême (ça passe ou ça casse). [...]