Socrate est unanimement reconnu comme le « père de la philosophie ». Pour certains, il est même le « père de l'Occident ». Incontestablement, Socrate est devenu une figure emblématique, totémique, un symbole au point que la philosophie s'identifie à lui et que tous ses prédécesseurs se trouvent ravalés au rang de penseurs « présocratiques ». De nombreux interprètes vont même jusqu'à établir un parallèle entre Socrate et Jésus : tous deux ont exercé leur activité dans un coin perdu du monde et dans laps de temps très court tout en ayant eu une influence historique immense ; leur enseignement fut oral articulant le geste à la parole ; tous deux n'ont rien écrit ; tous deux firent scandale et furent condamnés à mort par la société dans laquelle ils exerçaient ; tous deux eurent des disciples en petit nombre mais qui eurent une grande activité déterminante après leur mort. Ici s'arrête l'analogie car le legs socratique se diffusa à travers une multitude d'écoles opposées laissant deviner la complexité des contours de la « doctrine socratique ».
Reste malgré tout un paradoxe : comment cet homme peut-il occuper une place centrale au sein de la culture occidentale alors qu'il n'a rien écrit et que nous ne connaissons rien ou presque de sa vie ? Surmonter ce paradoxe implique d'abord de saisir le sens de la « révolution » impulsée par Socrate. Auparavant, nous rappellerons quelques éléments biographiques en guise de repères (...)
[...] A plus de 50 ans (vers 315), Socrate se marie avec Xanthippe nettement plus jeune et dont le tempérament est orageux. Très vite, il a un premier fils, Lampoclès. A la fin de sa vie, il aura 2 autres fils : Sophronisque et Ménexène. La tradition lui a parfois attribué une seconde femme, Myrto, avec qui il aurait vécu maritalement après l'avoir recuillie. A la fin de sa vie, Socrate connaît plusieurs heurts avec les dirigeants politiques. Il lui est d'abord reproché d'avoir été le maître de Critias qui se révéla, au pouvoir, un tyran sanguinaire. [...]
[...] Socrate, seul contre tous, affronta la foule et refusa la condamnation. Les deux épisodes révèlent un point fort de la doctrine de Socrate qu'est le légalisme. Il ne se contente pas de le professer mais aussi le met en œuvre notamment lorsque, injustement condamné à mort, il refuse de partir et accepte la sentence par fidélité à la loi. Or, cette attitude a quelque chose de nouveau. La loi (nomos) désigne à l'origine ce - 10 - qui est accepté par tous avant de prendre le sens de ce qui est institué par les hommes. [...]
[...] Bref, le Socrate philosophe est absent de chez Xénophon mais aussi très largement le Socrate historique. Il est une source plutôt accessoire. Platon (428-348 av. : Sur les 28 dialogues authentiques venant de Platon, tous mettent au centre de la scène le personnage de Socrate à l'exception d'un seul, Les Lois, qui fut son dernier texte. Cette seule donnée fait surgir un problème : comment identifier ce qui relève de Socrate de ce qui appartient à Platon en propre si la quasi intégralité de son œuvre met en scène Socrate ? [...]
[...] Socrate considère le domaine des dieux comme inaccessible. En un sens, il corrige la thèse de Protagoras sur l'homme mesure de toute chose en la relativisant nettement ; l'homme n'est pas la mesure de tout car il est soumis à une transcendance, à un Dieu inaccessible qui s'identifie au Bien suprême. En même temps, ce dieu est plutôt conçu sur le modèle non pas de la parenté (Hésiode), de l'amour (Empédocle) mais de l'artisan ; il a créé et ordonné le monde selon un projet optimal ou tout se réalise de la meilleure façon possible. [...]
[...] Les grands penseurs Un portrait tout en nuance de Socrate et de sa pensée qui tente de mobiliser toutes les sources. Gilles Romeyer Dherbey et J.B. Gourinat (dir.), Socrate et les socratiques, Paris, Vrin Vilhena V. de Magalhâes, Le problème de Socrate. Le Socrate historique et le Socrate de Platon, Paris, PUF Une étude importante sur la reconstitution du Socrate historique à partir des écrits de Platon en essayant de faire la part de l'un et de l'autre. Leo Strauss, Socrate et Aristophane [1966], Combas, Ed. [...]
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