Giordano Bruno, livré à l’Inquisition, hérétique impénitent, apologétique, l’homme religieux, débauche
Lorsqu'il apparaît au XVIe siècle, le mot « libertin » se veut insultant, il désigne aussi bien les jeunes nobles débauchés que des philosophes qui revendiquent la liberté de pensée.
Les libertins de pensée, qui s'expriment surtout aux XVIIe et XVIIIe siècles, reconnaissent un précurseur qui devient pour eux une référence : Giordano Bruno (1548-1600). Cet Italien est d'abord un moine dominicain, qui quitte cet ordre en 1576. On le retrouve à Genève où il se convertit un moment au calvinisme, puis à Paris où il obtient une chaire à la Sorbonne. Après quelques années de voyage en Allemagne, il rejoint l'Italie où il est livré à l'Inquisition en 1592.
[...] La sexualité s'avère ainsi le terrain sur lequel le libertin se prouve sa puissance. Mais il ne peut que se heurter au piège du plaisir qui fait de lui, alors qu'il revendique une totale liberté, un dépendant, un prisonnier de son propre plaisir charnel. Le but ultime du libertinage se définit alors ainsi : Jouir dans l'insensibilité un oxymore qui traduit les impasses de cette quête des plaisirs. L'œuvre de Sade à la fin du XVIIIe siècle illustre cette philosophie cynique du plaisir. [...]
[...] Il parvient sur le Soleil où il fait la rencontre de Campanella, qui vit l'éternité solaire réservée aux philosophes. Dans ce monde, les plantes et les animaux, qui parlent et raisonnent, contestent la supériorité de l'homme sur les autres êtres vivants, remettant en cause le statut de l'homme comme créature privilégiée de Dieu. Ils s'étonnent également que les hommes puissent supporter partout l'oppression, tant dans leur vie familiale que religieuse ou politique. Une morale du plaisir Beaucoup de libertins cultivent un art de vivre fondé sur les valeurs d'Épicure, l'équilibre, l'harmonie, l'amitié. [...]
[...] Une conception matérialiste du monde Les philosophes matérialistes grecs Démocrite et Epicure sont de nouveau étudiés par les libertins. Gassendi (1592-1655) par exemple consacre plusieurs ouvrages à Épicure, et, sans exclure Dieu, il affirme que l'atomisme permet de rendre compte de la perception et de la connaissance que nous avons de l'univers. Certains libertins sont athées ; selon eux, il n'existe pas d'autre monde que notre univers et l'âme n'est pas immortelle, les êtres en mourant se dissolvent pour donner d'autres êtres dans une temporalité sans limites ; l'intelligence elle-même émane d'un cerveau qui est purement matériel, les idées produites par ce cerveau ne peuvent qu'être relatives, elles dépendent des conditions matérielles qui les ont produites. [...]
[...] Molière, Dont Juan Le personnage éponyme de Molière est l'archétype du libertin. Il se définit dans une réplique, véritable aphorisme du libertinage, adressée à son valet qui incarne l'homme religieux et qui l'interroge sur ses convictions : Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit». L'interpellation Sganarelle ne relève pas de la seule logique du discours, elle montre que Dom Juan se définit par opposition à l'homme religieux. Je crois est ironique, puisque le verbe approprié est savoir et non croire ; cette ironie affirme que le libertin a abandonné la croyance irrationnelle pour la connaissance rationnelle symbolisée par l'arithmétique. [...]
[...] Le défi de Dom Juan à l'encontre de la statue du Commandeur est un acte de provocation qui fait de lui un révolté devant l'autorité religieuse. On comprend que Molière ne peut que faire mourir son personnage s'il veut sauver sa pièce de la censure. Cyrano de Bergerac ,Les États et Empires de la Lune ; Les États et Empires du Soleil Ces deux ouvrages sont posthumes, leur auteur meurt en 1655, on est certain qu'ils ont été modifiés pour en atténuer la virulence, mais ils demeurent très audacieux. [...]
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