Commentaire d'un extrait du livre II de L'Ethique, la scholie de la Proposition 47 de Spinoza. Il traite de la connaissance et la conception des choses que nous pensons percevoir.
[...] La nature ainsi que l'origine du langage doivent donc se comprendre selon le même processus de confusion- simplification pratique qu'opère un corps complexe mais toujours limité, face à la multiplicité du réel. D'une part, contrairement à ce qu'affirmait Descartes, le langage s'explique par le Corps et non par l'entendement ; mais d'autre part c'est à l'intérieur de la sphère de la recognition, c'est-à-dire d'une connaissance non adéquate, que le langage s'inscrit. La pensée n'a également de commun avec les autres choses, à présent de même nom, que l'effet relativement semblable qu'elle produit sur notre Corps. [...]
[...] De même, celui qui se trompe dans un calcul a dans l'esprit d'autres nombres que sur le papier. Si donc vous ne faites attention qu'à ce qui se passe dans son esprit, assurément il ne se trompe pas ; et néanmoins il semble se tromper parce que nous croyons qu'il a dans l'esprit les mêmes nombres qui sont sur le papier. Sans cela nous ne penserions pas qu'il fût dans l'erreur, comme je n'ai pas cru dans l'erreur un homme que j'ai entendu crier tout à l'heure : Ma maison s'est envolée sur la poule de mon voisin ; par la raison que sa pensée véritable me paraissait assez claire. [...]
[...] Le soin qu'il met à définir ses objets, à en déterminer le concept, celui qu'il apporte aux démonstrations, n'empêchent cependant pas ses adversaires d'autrefois ni le lecteur d'aujourd'hui de l'entendre mal, parce qu'ils conservent en l'esprit sous le même mot, en l'occurrence sous le nom de Dieu, leurs images consacrées ou naïves. plupart des erreurs consistent seulement en ceci que nous n'appliquons par correctement les noms aux choses». Il explique comment cela arrive: on associe, en entendant ou en lisant des mots de quelqu'un d'autre, à ces mots ce que notre Corps a appris d'y associer, en fonction de notre propre parcours historique. Cela ne garantit en rien que c'était cela ce que l'auteur voulait exprimer par ces mots. [...]
[...] Il démontre que ce n'est pas au niveau des pensées, mais au niveau des mots que se situent les controverses. Cette affirmation ne vise d'ailleurs nullement à minimiser la profondeur des polémiques ou à alléger la faute des adversaires. Au contraire elle les accuse non plus de mal penser, mais de ne pas s'élever de l'imagination à l'intuition. Un théologien ne cesse en quelque sorte de proférer des lapsus ; il serait ridicule d'y chercher une pensée. Là où il n'y a pas de pensée, il ne peut y avoir d'erreur ! [...]
[...] S'agit-il d'une idée non adéquate des choses, c'est-à-dire d'une erreur dans la saisie du réel ou bien du fait que les hommes se contentent de la connaissance du premier genre ? Pour Spinoza il s'agit peut-être de déterminer la connaissance d'un troisième genre comme connaissance de Dieu. Dans ce sens l'objet sur lequel portent les désaccords évoqués n'est pas les mœurs respectives des poules et des maisons, mais plutôt sur l'image [conservée en l'esprit sous le même mot] et l'utilisation des mots. [...]
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