Je vois une bouteille d'eau rouge sur la table en face de moi. Mais puis je être sûr qu'elle existe ? Un daltonien par exemple la voit déjà d'une couleur différente, et en poussant le raisonnement encore plus loin, mes sens me trompent ils (comme le bâton plongé dans l'eau qui parait rompu) et inventent ils cette bouteille ? C'est tout le problème de la réalité et de la vérité du sensible, des objets que je perçois à travers mes sens. Ce doute atteint même les objets non pas soumis au sens mais à l'esprit, à l'intelligible : par exemple un triangle isocèle. Comment savoir que ce triangle isocèle existe, que ses propriétés sont possibles et vraies ?
Ce doute est d'autant plus important qu'il remet en cause le fondement même des sciences. Les sciences prétendent enseigner un savoir sur notre monde ou dans l'absolu, un savoir vrai c'est-à-dire qu'il est juste pour tout temps, à toute époque grâce à des démonstrations rigoureuses, mais la base même de la réflexion n'est elle pas illusoire ? Car la science repose sur les objets sensibles et/ou intelligibles, c'est ici donc un enjeu majeur que de déterminer la véracité et la réalité de ceux-ci. Ce qui est enjeu ici c'est la nature de l'Homme même, peut il connaître la vérité ? Alors que depuis le début de son existence, il mène une quête acharnée pour la vérité, celle-ci serait elle impossible voire illusoire ?
[...] On ne peut rien justifier, et on ne peut même pas dire que l'objet intelligible est faux, c'est le même phénomène que l'infini sauf enfermé dans une boucle. C'est donc également une mauvaise option. Toutes les branches de l'arbre sont alors fermées pour justifier qu'un objet sensible soit vrai. Faut-il alors abandonner cette voie et examiner l'autre, puisque toutes les possibilités envisageables pour justifier cette thèse se sont avérées impossible ? Certains ont tenté d'échapper à ces problèmes d'infini et de cercle vicieux grâce aux postulats. [...]
[...] C'est pourquoi celui qui use d'hypothèses s'expose derechef à une absurdité. En outre, les intelligibles sont aussi des relatifs. Car, comme leur nom l'indique, ils sont relatifs à l'intellect qui les conçoit, et si leur nature était telle que le terme semble l'indiquer, il n'y aurait pas de désaccord à leur sujet. Nécessairement donc l'intelligible n'échappe pas non plus aux cinq modes, de telle sorte que touchant l'objet qui nous est présenté, nous devons nécessairement en tout cas suspendre notre jugement. [...]
[...] Comment savoir que ce triangle isocèle existe, que ses propriétés sont possibles et vraies ? Ce doute est d'autant plus important qu'il remet en cause le fondement même des sciences. Les sciences prétendent enseigner un savoir sur notre monde ou dans l'absolu, un savoir vrai c'est-à-dire qu'il est juste pour tout temps, à toute époque grâce à des démonstrations rigoureuses, mais la base même de la réflexion n'est elle pas illusoire ? Car la science repose sur les objets sensibles et/ou intelligibles, c'est ici donc un enjeu majeur que de déterminer la véracité et la réalité de ceux-ci. [...]
[...] Sextus Empiricus commence par examiner l'idée que les objets sensibles sont vrais. Par quoi pourrait-on alors justifier cette thèse ? L'homme ne possède que deux objets pour justifier un autre objet : soit l'objet sensible, soit l'objet intelligible, en effet il ne dispose que du concret (le sensible, ce qu'il perçoit par ses sens) ou de l'abstrait (les lois physiques, les grandeurs, Sextus Empiricus va donc envisager les deux situations méthodiquement pour voir laquelle est correcte. Tentons de justifier un objet sensible par un autre objet sensible (il s'agit donc ici de la thèse que seuls les objets sensibles sont vrais). [...]
[...] Si l'on justifie un objet intelligible par un autre objet intelligible (pour reprendre notre exemple, la loi de la gravité est juste car il existe dans l'espace une autre loi qui établit la gravité pour toutes les planètes ayant une atmosphère), on retombe dans le schéma de justifier un sensible par un sensible, en effet le second intelligible a autant de valeur que le premier et il faudra à son tour le justifier par un autre intelligible, c'est de nouveau l'infini qui s'ouvre devant nous et qui ne parvient jamais à justifier l'objet intelligible de base. Ce n'est donc pas la bonne solution. Tentons donc de justifier l'objet intelligible par un objet sensible (pour reprendre l'exemple, la loi de gravité est juste car je peux observer ce phénomène à d'autres endroits sur terre, ce serait donc le modèle de l'induction), ceci n'est logiquement pas possible. En effet au tout début de notre raisonnement nous cherchions à fonder un objet sensible. [...]
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