Bergson, philosophe majeur de la première moitié du XXe siècle, consacre ici une partie de son ouvrage “Le Rire”, à l'étude du langage, et plus précisément des “mots”, et leurs significations ainsi que les conséquences morales qui en découlent. À première vue, le langage serait un ensemble de signes linguistiques, de mots, socialement institués pour décrire le monde extérieur, et exprimer un certain nombre de sensations et de sentiments.
Aussi, dans cette optique, le langage serait comme un reflet du monde, mais sur le mode de la pensée, il serait là pour traduire le monde et le soumettre à la communication entre les hommes. Pour Bergson, il en est tout autre chose. Selon lui, notre vision du monde, des choses extérieures et même des sentiments, se limite à un espace réduit, celui permis par le langage. En d'autres termes, il semblerait que nous ne voyions pas les choses comme elles apparaissent véritablement, mais que nous les voyions telles que les mots nous les font apparaitre...
Ne sommes-nous pas dessaisis d'une partie de notre “moi” personnel à partir du moment où le langage est inapte à traduire nos sensations et nos pensées si ce n'est dans une perspective universelle ? En ce sens, à quoi sert-il de penser, de réfléchir, de ressentir si rien ne permet de partager le fruit de notre individualité, de notre singularité, avec nos alter ego ?
[...] "Le rire", Henri Bergson - "nous ne voyons pas les choses mêmes ; nous nous bornons le plus souvent à lire les étiquettes collées sur elles" Commentaire de texte Nous ne voyons pas les choses mêmes ; nous nous bornons le plus souvent à lire les étiquettes collées sur elles. Cette tendance, issue du besoin, s'est encore accentuée sous l'influence du langage. Car les mots (à l'exception des noms propres) désignent des genres. Le mot, qui ne note de la chose que sa fonction la plus commune et son aspect banal, s'insinue entre elle et nous, et en masquerait la forme à nos yeux si cette forme ne se dissimulait déjà derrière les besoins qui ont créé le mot lui-même. [...]
[...] Aussi nous ne voyons du sentiment que son “concept général”, mis en lumière par un mot, nous nous limitons à saisir le sentiment dans son aspect commun pour tous, sans considérer sa singularité, ce qui fait qu'il est “nôtre”. Si le langage a pu trouver une représentation mentale et linguistique à ce sentiment c'est qu'un nombre important de personnes le ressentent, même de manière différente : “pour tous les hommes” il y a donc un aspect universel. Il ne considère qu'un aspect général, commun pour un sentiment qui s'exprime de manières multiples. [...]
[...] Dès la ligne 3 et jusqu'à la ligne 13, Bergson justifie sa thèse et explique comment la comprendre, ce qui lui permet par ailleurs de la soumettre à la critique du lecteur. Enfin, le troisième mouvement des lignes 13 et 14 correspond à la poursuite logique de sa thèse, ses conséquences morales et les enjeux. A première vue, le langage serait un ensemble de signes linguistiques, de mots, socialement institués pour décrire le monde extérieur, et exprimer un certain nombre de sensations et de sentiments. [...]
[...] (La conscience c'est une entité de l'être qui le caractérise en tant que sujet, donc en tant qu'être libre, conscient et responsable, la conscience est avant tout réflexive et permet le retour sur soi et la connaissance de soi, la compréhension du monde extérieur et la réflexion.) A ce moment, pour Bergson, le sentiment perd toute connotation singulière c'est-à-dire ses “mille nuances fugitives” et ses “mille résonances profondes” dès lors qu'il y a conscience, puisqu'il est immédiatement “formaté”, et associé au “concept” de sentiment, qui ne tient pas compte de la “singularité”. Aussi, le sentiment n'est donc plus “absolument nôtre” mais commun, et partagé par des milliers de sujets. Bergson justifie son idée par le fait que sinon ; “Nous serions alors tous romanciers, tous poètes, tous musiciens”. Le propre de ces hommes étant de parvenir à exprimer des sensations, des émotions, des sentiments enfouis au plus profond de leur à l'aide de mots, de notes ou de sons musicaux. [...]
[...] Aussi, il apparaitrait selon lui que nous ne pouvons voir les sentiments tels qu'ils nous apparaissent véritablement, mais plutôt comme le langage nous le permet, c'est-à-dire, “impersonnellement”. Ce constat fait par Bergson nous pousse à nous questionner . En effet, en admettant une telle vision que celle exprimée par ce dernier, nous admettrions être en quelque sorte “formatés” par un langage qu'il nous faut pourtant accepter pour communiquer. Ainsi, le langage nous ferait oublier une partie de notre personnalité, pour nous faire tendre vers l'universel, l'impersonnel ce qui ferait de nous, hommes, des êtres tous semblables. [...]
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