Il arrive que, après une action mauvaise ou contestable moralement, une personne cherche à s'en excuser en faisant valoir qu'elle a subi l'influence de circonstances malheureuses, ou qu'elle a en effet trop facilement cédé à quelque tentation ou impulsion immédiate. Peut-on admettre, du point de vue philosophique, la valeur de ce recours à un pouvoir (même minime) étranger ?
Hegel montre ici que, avant l'acte que l'on prétendra avoir commis sous l'effet des circonstances, il y a un choix qui a donné à celles-ci leur pouvoir de détermination. Ainsi, la responsabilité du sujet demeure entière : il n'a pas d'excuse; mais en choisissant d'obéir aux circonstances, il s'est nié comme essence libre (et a donc agi de manière amorale, ou inhumaine).
[...] Le vocabulaire utilisé souligne la passivité du sujet, invité poussé ou entraîner à mal agir. La passivité implique une activité antérieure Admettre une telle passivité, c'est-à-dire une détermination du sujet par l'extérieur, ce serait reconnaître l'impuissance du vouloir. Mais, en amont de cette passivité, Hegel fait valoir une activité réelle, et essentielle (au sens le plus fort: elle concerne l'essence même du sujet moral): c'est le vouloir qui a d'abord assumé les circonstances comme mobiles. Autrement dit, le vouloir, par rapport à des circonstances invitant à mal agir, a toujours le choix: soit de leur obéir en els reconnaissant comme mobiles efficaces, soit de les rejeter en refusant leur détermination. [...]
[...] L'absence de raison entraîne l'irresponsabilité Si, par ailleurs, le choix moral implique l'intervention d'une raison pleinement développée, que devient-il lorsque cette dernière fait défaut? Il apparaît cette fois que le texte concerne l'homme normal, ou moyennement rationnel, mais ne peut être appliqué à celui dont la raison est déficiente, pour quelque raison que ce soit, qu'on le qualifie de fou comme au temps de Hegel, ou de malade mental On sait que la question de la responsabilité de ce dernier devient cruciale lorsque sa conduite est immorale si l'on maintient comme absolument nécessaire l'activité de la raison entière, amorale) au point d'être socialement gênante: le problème est de savoir si elle peut être synonyme d'une responsabilité pénale. [...]
[...] II- Indépendance de la réflexion La réflexion dépasse la détermination par les circonstances Cette reconnaissance du pouvoir de détermination des circonstances dépend de ce que Hegel nomme la réflexion dont l'exercice se confond avec l'existence du sujet (du je). Réfléchir, c'est notamment estimer les conséquences possibles d'un acte, capacité qui signale immédiatement que la détermination par les circonstances est différée, mise à distance, au moins momentanément suspendu. C'est parce qu'il peut exercer cette réflexion que le sujet moral récuse la relation (mécanique ou automatique) de causalité. [...]
[...] Rousseau considérait déjà que l'homme qui renonce à sa liberté perd sa qualité d'homme, et Hegel le confirme à sa manière: il n'y a pas de moyen terme entre l'essence libre et l'essence non libre. Accepter les circonstances, c'est perdre son humanité En prolongeant la réflexion, on en vient donc à considérer que celui qui prétend avoir été entraîné par les circonstances n'est plus essentiellement humain. A ceci près que cette perte n'est que momentanée: elle a lieu lors du renoncement à la réflexion. [...]
[...] Peut-on admettre, du point de vue philosophique, la valeur de ce recours à un pouvoir (même minime) étranger? Hegel montre ici que, avant l'acte que l'on prétendra avoir commis sous l'effet des circonstances, il y a un choix qui a donné à celles-ci leur pouvoir de détermination. Ainsi, la responsabilité du sujet demeure entière : il n'a pas d'excuse ; mais en choisissant d'obéir aux circonstances, il s'est nié comme essence libre (et a donc agi de manière amorale, ou inhumaine). [...]
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