La conscience de soi concerne en priorité le sujet ou elle se manifeste. Une fois posée, comment peut-elle éviter le solipsisme, cette réduction du monde au seul sujet affirmant son existence? Descartes répond à la question par un détour métaphysique, qui met en lumière l'existence d'un Dieu non trompeur. Mais ne peut-on concevoir une façon plus "économique" et plus directe d'accorder à autrui une existence de même nature que la mienne ?
C'est-ce que propose Bertrand Russell dans ce texte, en affirmant que, si les faits de conscience en autrui ne sont pas directement accessibles, on peut néanmoins en admettre l'existence à partir de sa présence physique.
[...] "Problèmes de philosophie", Bertrand Russell - la conscience de soi La conscience de soi concerne en priorité le sujet ou elle se manifeste. Une fois posée, comment peut-elle éviter le solipsisme, cette réduction du monde au seul sujet affirmant son existence? Descartes répond à la question par un détour métaphysique, qui met en lumière l'existence d'un Dieu non trompeur. Mais ne peut-on concevoir une façon plus économique et plus directe d'accorder à autrui une existence de même nature que la mienne? [...]
[...] Cela permet de comprendre que l'activité mentale des autres peut éventuellement s'éloigner de celle que je connais en moi: qu'elle peut être celle d'un fou ou d'un primitif L'approche de l'autre et de son esprit proposée par Russell a l'avantage d'être simple. En se fondant sur l'expérience directe de chacun, celle de son propre esprit et celle de la perception physique de l'autre, il fait l'économie de toute métaphysique. Mais ce texte a aussi ses limites: s'il esquisse en sa fin la possibilité, pour l'autre, d'avoir une activité mentale totalement différente de la nôtre, il ne peut explorer les conséquences morales d'une considération portée à ce qui constitue véritablement autrui comme tel. [...]
[...] Il a donc un esprit animé de faits de conscience, et une conscience de soi. La démarche précise ce que Malebranche nommait conjecture Nous conjecturons que les âmes des autres hommes sont de même espèce que la nôtre Il est notable que ce repérage d'une ressemblance, non seulement physique, mais également mentale, paraisse, une fois effectuée la médiation par le corps, direct. Russell ne fait intervenir aucune communication (par exemple par le langage) entre les deux sujets. Un échange de paroles n'indiquerait- il pas la présence en l'autre d'un esprit comparable au mien (l'animal ne peut se faire comprendre ainsi)? [...]
[...] Pour ce qui est des âmes des autres hommes disait déjà Malebranche, nous ne les connaissons présentement ni en elles-mêmes, ni pas leurs idées, et comme elles sont différentes de nous, il n'est pas possible que nous les connaissions par conscience (De la recherche de la vérité). La conscience ainsi établie risque en conséquence d'aboutir à un solipsisme, n'accordant d'existence réelle qu'à elle-même. C'est déjà l'obstacle que rencontre le cogito cartésien: une fois assurée l'existence de la substance pensante, comment affirmer d'autres existences, étant admis que les sens sont trompeurs, et que le doute peut bien être hyperbolique ? Peut-on faire l'économie du retour métaphysique? [...]
[...] Il en résulte que le repérage d'autrui comme également doté d'activité mentale semble facile, même s'il ne peut être aussi immédiat que celui de la conscience de soi. Autrui est d'abord un corps Pour Russell, autrui est d'abord un corps perçu: puisque je ne suis pas là où je vois ce corps, c'est qu'il y a de l'autre. Et de ce corps dépendant un certain nombre de données nous parvenant: sa forme, sa taille, son allure, ses mouvements Cela suppose que le corps de l'autre est reconnu sans attendre comme corps également humain, par rapide comparaison avec ce que je connais du mien: il me ressemble. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture