Notre analyse portera sur un texte essentiel de la philosophie de Nietzsche, Par-delà bien et mal, plus particulièrement sur le deuxième volet de la première section, Des préjugés des philosophes : les aphorismes 13 à 23. Dans ce texte assez limité, mais plutôt édifiant pour comprendre la pensée de Nietzsche, il nous faudra examiner globalement les théories qui en ressortent, élaborer un commentaire thématique sur les composantes de sa pensée, et un commentaire stylistique plus restreint, en reprenant la version originale du texte allemand.
Nous procéderons en épinglant les principales thématiques, résultant d'une lecture transversale des aphorismes.
[...] Ici aussi, bref exposé historique : L'histoire du concept débute chez Aristote. Le Stagirite introduit la notion de l'être-en-vue-de-soi qui caractérise l'homme libre par opposition à l'esclave, entravé à un maître. Traduit en latin, l'être qui est sa propre fin devient causa sui, ce qui ajoute d'emblée l'idée de causalité. Durant le reste de la tradition philosophique, le terme aura deux orientations majeures, qu'il convient de distinguer pour saisir toute sa portée : d'une part, celle de Thomas d'Aquin, celui qui n'est pas la cause (ou l'instrument) d'un autre (vaut pour l'ETRE HUMAIN) ; d'autre part, celle de Descartes : la subsistance par soi une raison pleine, autonome et autosuffisante, qui n'est applicable qu'à un principe divin. [...]
[...] La référence ici, comme dit précédemment, importe peu en elle-même ; il faut la rapporter aux autres métaphores politiques[51] permettant d'intelliger la vie du corps la précédente exposition théorique, en vérité, est construite sur une analyse des métaphores politiques du corps Race (Rasse) et hors-race Nietzsche évoque à la fin du paragraphe 20 la race Ne nous laissons pas dérouter par la conception actuelle de race Le critère que Nietzsche invoque est d'ordre physiologique : appartient à la race un certain type d'homme formé par une sélection sur le plan pulsionnel. Il faut insister sur le caractère évolutif de cette formation ; le résultat l'homme de race n'en est que l'aboutissement. A l'inverse, l'évolution des gens hors-race relève du hasard ; ils n'ont pas subi de sélection pulsionnelle La volonté pulsionnelle Nietzsche introduit[53] la notion de volonté forte ou faible. [...]
[...] Et tout ce concept "instinct de conservation en fait partie. Fragments posthumes, Gallimard, t [313] : "Conservation de soi" : simple conséquence secondaire et non but ! Influence persistante de Spinoza! Deus sive natura ; Petit Larousse s.v. Spinoza Il serait plus ardu d'essayer de nuancer cette approche, synthétisée et ramassée à outrance, de la substance moniste par une lecture plus approfondie du Tractatus theologico-politicus. Fragments posthumes, t [83]. Dans le quatrième tome des traités de l'Organon : Les Seconds analytiques, II - ein derbes arbeitsames Geschlecht von Maschinisten die lauter grobe Arbeit abzutun haben une espèce rude et dure à la tâche de machinistes [ qui n'auront à accomplir que du travail grossier - Prinzip der größtmöglichen Dummheit : principe [des physiologues] [ ] de la plus grande imbécillité possible - der Zauber der platonischen Denkweise: ensorcellement du mode de pensée platonicien - dies mittels blasser kalter grauerBegriffs-Netze: les philosophes devaient rester maîtres de leur sens [ ] au moyen de filets tissés de concepts hâves, froids, grisâtres à propos de ce que la véritable psychologie doit être : eine Lehre von der Ableitbarkeit aller guten Triebe aus den schlimmen: une doctrine selon laquelle on peut faire dériver toutes les bonnes pulsions des mauvaises Se défiant d'une intellection trop rationaliste du réel, ils soulignaient le lien intrinsèque entre bonnes et mauvaises qualités, vices et vertus chez l'homme. [...]
[...] Notre propos n'est pas de placer cette affirmation péremptoire dans la lignée des moralistes français (par exemple Fontenelle et La Rochefoucauld[19]), mais bien d'accentuer le fait que, comme nous le systématiserons par après ( 2.7 Nietzsche ne se contente pas de reprendre simplement la dialectique des moralistes français : il radicalise leur entreprise de questionnement psychologique La phénoménologie transcendantale contre le sensualisme 15) Nietzsche déconstruit la pensée de Kant[20] : le phénomène, perçu par nos sens, se manifeste directement à la conscience. Il se définit par opposition au noumène : la chose en soi qui transcende toute expérience humaine possible. Nietzsche ne fait qu'une utilisation déplacée de la Ding an sich (cf. infra). La pensée de Nietzsche est particulièrement retorse et complexe : il prouve d'abord que les organes sensoriels ne sont pas des phénomènes[21], parce qu'ils sont des causes (du monde extérieur). [...]
[...] BLONDEL É., Nietzsche, le corps et la culture ; p BLONDEL É., op. cit., p et p NIETZSCHE FR., Aurore, préface, Gallimard 5 : se tenir à l'écart, prendre son temps, devenir silencieux, devenir lent cf. N VII : Un bon philologue (et en général tout être instruit à l'école de la philologie) éprouve une répugnance à l'égard des fausses interprétations [Ausdeutungen] de textes. Les philosophes n'ont pas appris à lire et interpréter [interpretieren] correctement, ils sous-estiment la difficulté de comprendre réellement ce qu'un autre a dit, et n'y appliquent pas leur attention. [...]
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