Analyse du concept de liberté chez Descartes. Thèse : l'exercice du libre-arbitre suppose l'intervention de la volonté et de l'entendement or si le pouvoir de la volonté est infini, celui de l'entendement est limité. Une telle dissymétrie est à l'origine de nos erreurs.
[...] Texte : Descartes, Principes de la philosophie (1644), Pléiade, I & 35, p 34. Que la volonté aussi bien que l'entendement est requise pour juger. - J'avoue que nous ne saurions juger de rien, si notre entendement n'y intervient, parce qu'il n'y a pas d'apparence que notre volonté se détermine sur ce que notre entendement n'aperçoit en aucune façon ; mais comme la volonté est absolument nécessaire, afin que nous donnions notre consentement à ce que nous n'avons aucunement aperçu, et qu'il n'est pas nécessaire pour faire un jugement tel quel que nous ayons une connaissance entière et parfaite ; de là vient que bien souvent nous donnons notre consentement à des choses dont nous n'avons jamais eu qu'une connaissance fort confuse Qu'elle a plus d'étendue que lui, et que de là viennent nos erreurs. [...]
[...] Spontanément, nous avons l'impression d'agir librement. Et le sentiment de contrainte éprouvé si nous sommes forcés d'agir contre notre volonté semble confirmer cette impression. La volonté désigne notre faculté de vouloir : à la fois capacité que nous avons de nous prescrire des fins et de tendre vers elles de toutes nos forces. La volonté est, en droit, infinie (on peut tout vouloir, même être Dieu). Que signifie alors le fait de dire que notre faculté de vouloir est libre ? [...]
[...] C'est alors que nous nous égarons, nous trompons, lorsque notre volonté désire ou affirme, veut ou juge quelque chose que notre entendement ne saisit pas clairement et distinctement. Plus généralement, notre faculté de connaître étant limitée, nous sommes incapables de savoir si les fins que nous poursuivons s'accordent avec les fins que Dieu se donna en créant l'homme et le monde. La fin suprême, la plus haute de toutes les fins, par rapport à laquelle toutes nos actions acquièrent un sens et une valeur, nous demeure inconnue. Dieu a façonné l'homme à son image : il l'a doté d'une volonté absolument libre (condition du péché originel). [...]
[...] Combattant ce point de vue pessimiste, Descartes remarque que Dieu, en nous dotant du libre-arbitre, en nous faisant maître de nous-même (Traité des passions, a 152) et, par là même, semblable à lui, nous indique la voie à suivre : nous devons apprendre à faire bon usage de notre libre-arbitre. Car, en effet, c'est de ce bon usage du libre- arbitre que vient le plus grand et le plus solide contentement de la vie (Lettre à Christine de Suède, 20/11/1647). [...]
[...] A ce propos, dire que j'agis ainsi parce que cela me fait envie est bien souvent le masque de l'obscurité et de la confusion. Affirmer qu'être libre, c'est agir selon son envie est, en fait, s'en tenir au plus bas degré de la liberté, parce qu'on n'a pas une connaissance claire et distincte des raisons pour lesquelles on agit. C'est le point de vue du sens commun pour qui être libre correspond à une absence apparente de contrainte (mais l'absence n'est qu'apparente et dépendante, en fait, de notre ignorance des causes pour lesquelles on agit). [...]
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