Emmanuel Kant, "Annonce du programme des leçons" : philosophie et apprentissage

Résumé du document

Dans un premier temps (ligne 1 à 6), Kant explique que la philosophie déroute l'étudiant qui l'aborde, car il n'avait fait qu'apprendre des contenus qu'on lui présentait alors que maintenant il doit penser par lui-même ; ce qui, pour lui, est nouveau.

Dans un second temps (l 6 à 16), on comprend que la philosophie apparaît comme une quête, une recherche comme l'indique d'ailleurs son étymologie amour, désir, recherche de la sagesse (...)

Extraits

[...] L'étudiant qui sort de l'enseignement scolaire était habitué à apprendre. Il pense maintenant qu'il va apprendre la Philosophie, ce qui est impossible car il doit apprendre à philosopher. Je vais m'expliquer plus clairement : toutes les sciences qu'on peut apprendre au sens propre peuvent être ramenées à deux genres : les sciences historiques et les sciences mathématiques. Aux premières appartiennent, en dehors de l'histoire proprement dite, la description de la nature, la philologie, le droit positif, etc. Or dans tout ce qui est historique l'expérience personnelle ou le témoignage étranger, - et dans ce qui mathématique, l'évidence des concepts et la nécessité de la démonstration, constituent quelque chose de donné en fait et qui par conséquent est une possession et n'a pour ainsi dire qu'à être assimilé : il est donc possible dans l'un et l'autre cas d'apprendre, c'est à dire soit d'imprimer dans sa mémoire, soit dans l'entendement, ce qui peut nous être exposé comme une discipline déjà achevée. [...]

[...] Ensuite, les sciences mathématiques : elles reposent "sur l'évidence des concepts" sur des concepts que la raison peut entièrement définir et "sur la nécessité de la démonstration" qui, partant de concepts évidents, aboutit par déduction à des conclusions nécessaires. Mais dans les deux cas, les connaissances sont des "données" qu'on a plus qu'"à assimiler", à apprendre". Pour les sciences historiques quelles qu'elles soient, il s'agit de les "imprimer dans la mémoire"; de les retenir durablement pour constituer le savoir. Pour les sciences mathématiques, il s'agit de les "imprimer dans l'entendement", de les comprendre pour pouvoir en retracer le raisonnement qui permet de les démontrer. [...]

[...] La méthode spécifique de l'enseignement en Philosophie est zététique, comme la nommaient quelques Anciens, c'est-à- dire qu'elle est une méthode de recherche. (Kant, Annonce du programme des leçons, 1765-1766) Problème : La spécificité de l'apprentissage de la philosophie en comparaison aux autres disciplines Fin de l'introduction Dans un premier temps (ligne 1 à Kant explique que la philosophie déroute l'étudiant qui l'aborde, car il n'avait fait qu'apprendre des contenus qu'on lui présentait alors que maintenant il doit penser par lui- même; ce qui, pour lui, est nouveau. [...]

[...] Or, il n'y a rien de tel en philosophie. Il n'y a pas un manuel contenant toutes les doctrines possibles qu'il conviendrait d'apprendre par cœur. Chaque penseur bâtit son œuvre en critiquant celle d'un autre. Et sans faire une œuvre, chacun est capable de philosopher d'abord en mettant en œuvre sa propre raison. On ne peut que s'entrainer, s'exercer à philosopher, même si c'est long, laborieux, difficile. Mais au final, la pensée devient libre. Tel est justement l'intérêt de la philosophie pour Kant. [...]

[...] 3ème étape Le rôle de la philosophie n'est pas d'apporter des vérités toutes faites, mais d'inciter à la recherche de la vérité, à la recherche de la sagesse, la sagesse désignant à la fois la connaissance, le savoir et l'action raisonnable, mesurée, impliquant la maitrise de soi. C'est ce que doit enseigner le professeur de philosophie. Il doit promouvoir auprès de ses élèves " la méthode de la recherche" de la philosophie, leur apprendre à se questionner, à interroger leurs préjugés, à remettre en doute les évidences non-fondées, à leur inculquer un certain "esprit d'inquiétude" comme le dira plus tard Jankélévitch. Se débarrasser des préjugés, c'est penser par soi même. Ce qui ne veut pas nécessairement dire penser seul et contre tous. [...]