I) L'homme libéré de la nécessité de travailler pour subvenir à ses besoins vitaux
II) L'homme privé de la seule activité qu'il possède : le travail
[...] En autorisant une égalité des chances de s'enrichir, elle impose une concurrence universelle pour la richesse et condamne ainsi à faire de toute activité un travail. Le peintre, le musicien, le romancier ou le ministre comme l'ouvrier spécialisé gagnent leur vie en pratiquant leur art. Peut-on objecter à Hannah Arendt que ses prévisions ne se sont pas réalisées ? L'automatisation progresse, bien des usines se vident effectivement, mais les hommes ne restent pas à rien faire, est-on tenté de penser. [...]
[...] C'est ce que Hannah Arendt va mettre en évidence. C'est une société de travailleurs que l'on va délivrer des chaînes du travail dit-elle avant d'ajouter immédiatement que cette société ne sait plus rien des activités plus hautes et plus enrichissantes pour lesquelles il vaudrait la peine de gagner cette liberté En devenant industrielle, la société a mis tous ses membres au travail, ne leur laissant plus le loisir de s'adonner aux activités traditionnellement réservées à ceux qui s'étaient libérés de la nécessité du travail, les activités de l'esprit. [...]
[...] Il faut et il suffit que l'explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question. Hannah Arendt (1906-1975) a consacré l'essentiel de sa pensée à l'activité politique, primordiale à ses yeux. Elle vécut dans la période trouble entourant les deux guerres mondiales. Profondément marquée par ces événements, elle s'intéressa aux mécanismes de la société contemporaine, ce qui la poussa à s'interroger sur la vie de l'homme dans cette société dans des essais tels que La condition de l'homme moderne, dont l'extrait proposé à notre lecture est tiré. [...]
[...] Pour se rassurer, le lecteur, qui appartient probablement en tant que tel à la catégorie des intellectuels, ne manquera pas de penser à ses pairs, sinon à lui-même, dont l'activité n'a plus de travail que le nom, en tant qu'elle est une activité de l'esprit au service de l'esprit. Hannah Arendt l'oblige à un examen de conscience : fait-il partie de ceux, dont elle dit qu'ils sont en petit nombre et qu'ils tiennent ce qu'ils font comme des oeuvres et non comme des moyens de gagner leur vie ? [...]
[...] Le loisir tel que nous l'envisageons aujourd'hui n'a plus grand-chose à voir avec ce que les hommes du Moyen Âge ont appelé l'otium, c'est-à-dire la possibilité de disposer de son temps pour se consacrer aux activités de l'esprit. À cela deux causes effectivement, associées par Hannah Arendt : l'avènement de la société industrielle et l'avènement de la démocratie. La société industrielle a imposé comme critère exclusif d'appréciation de nos activités le rendement et l'intérêt. Tout travail est jaugé à la seule unité de mesure de sa valeur d'échange. [...]
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