Dans cet extrait, issu de Léviathan : l'un des ouvrages les plus célèbres du philosophe britannique Thomas Hobbes, ce dernier s'aventure dans une entreprise des plus subtiles qui n'a cessé de susciter le débat, déchaîner les passions, et tourmenter les sages depuis l'Antiquité. En effet, Hobbes s'applique au fil de son raisonnement à élucider les rouages qui conduise l'homme à un état de parfaite satisfaction intérieure, en d'autres termes qui le mène à la félicité, à la béatitude, à un bonheur suprême. La quête du bonheur fonde ainsi le cœur de son argumentation.
Aspiration commune à tous ; le bonheur constitue pourtant une notion relativement complexe, dont les éléments peuvent parfois sembler contradictoires. En effet, si l'on considère l'étymologie du mot, le bonheur apparaît dès lors intimement lié à la notion de hasard, voire de fortune. En effet, ce terme dérive du latin « augurium », qui signifie « augure », « chance ». Le bonheur constituerait ainsi un phénomène d'une extrême précarité, qui nous échoit sans qu'on s'y attende, échappant ainsi à toute tentative de maîtrise. Néanmoins, il est souvent défini comme un état durable de satisfaction, en opposition au simple plaisir, ou encore à la joie, considérés comme des états affectifs incomplets et éphémères. Telle est l'ambiguïté du terme bonheur.
[...] En ce sens, le fait d'être attiré par et de vouloir attiré à soi peut être un élan positif qui témoigne d'un réel lien avec la vie. Ainsi, selon ses propres dires, Hobbes considère la félicité, comme une continuelle marche en avant du désir, d'un objet à un autre, la saisie du premier n'étant encore que la route qui mène au second Ce qui revient à dire que le bonheur ne sera à jamais qu'un horizon du désir. Le désir qui n'est autre que la recherche d'un objet que l'on imagine ou que l'on sait être source de satisfaction. [...]
[...] Hobbes illustre d'ailleurs cette théorie d'un exemple fort significatif : De là vient que les rois, dont le pouvoir est le plus grand de tous, tournent leurs efforts vers le soin de le rendre sûr, à l'intérieur du pays par des lois, à l'extérieur par des guerres. Ce dernier, fait nettement apparaître l'attention particulière que les rois prêtent à asseoir de manière irrévocable leur pouvoir, leur autorité aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de leurs royaumes, par le biais des lois et de la guerre. Un besoin de sécurité, d'assurance que l'on retrouve en chaque homme. [...]
[...] Telle est l'ambiguïté du terme bonheur. e Dès lors, nous pouvons nous interroger sur la représentation que Hobbes se fait du bonheur, serait-il la fin la plus haute que l'humanité puisse se proposer ? Le bonheur est-il le bien suprême ? Dans le premier paragraphe de son argumentation, Hobbes nous expose sa conception du bonheur, marquant ainsi une rupture avec les préceptes de la philosophie antique. En effet, il estime que la part de chance qui s'attache au bonheur, reçu parfois comme un don n'éclipse pas cependant le fait de la responsabilité personnelle dans la recherche des moyens propres à en assurer la pérennité. [...]
[...] Mais, parce qu'il nous comble, le bonheur porte avec lui une tentation. On voudrait pouvoir le posséder à jamais, c'est pourquoi il nous engage dans une quête fébrile et sans fin, qui nous maintient en vie. A l'inverse, Celui dont les désirs ont atteint leur terme celui qui croit s'être pleinement réalisé, avoir atteint une forme de sérénité ne peut plus vivre, puisque l'existence est désir. En effet, le désir constitue l'affirmation de la vie. Désirer c'est vouloir quelque chose puisque la vie nous intéresse, par opposition au fait de ne rien vouloir parce que plus rien ne nous intéresse. [...]
[...] Un désir se renouvelant continuellement, et qu'il faut à tout prix assouvir de nouveau, astreignant ainsi l'homme à mener une quête du pouvoir absolu, qui l'attelle jusqu'à la mort. Car seul le caractère absolu du pouvoir est la condition de sa stabilité, mais aussi la garantie de sa légitimité. Le pouvoir d'un l'homme consiste donc selon Hobbes dans ses moyens présents d'obtenir quelque bien apparent futur. Ainsi, ce n'est pas tant l'accroissement de sa satisfaction personnelle que l'homme recherche dans l'assouvissement de son désir à acquérir toujours davantage de pouvoir, mais la garantie de conserver, rendre pérenne cette satisfaction, dont découle son bien-être. [...]
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