Etude comparée du Guépard de Lampedusa et du Guépard de Visconti
C'est sans doute sur ce point que le choix des deux artistes diffèrent le plus.
Lampedusa a choisi dès le début de couvrir cinquante ans d'histoire, de Marsala à la veille de la Première Guerre.. En huit chapitres, eux-mêmes nettement fragmentés en sous-chapitres, il exprime, par à-coups successifs, l'avancée du temps et des événements, la déchéance physique du prince et la décadence des Salina : le processus est lent durant six chapitres ( couvrant les années 1860-1862) et se précipite dans les deux derniers ( chapitre VII, mort du prince : 1883, chapitre VIII, la « fin de tout » :1910).
I- Le découpage
II- Les thèmes
III- Le problème du style
[...] Visconti ne se contente pas de la description qu'en fait don Ciccio à don Fabrice, mais le montre en action : ridicule dans son frac, inflexible avec les paysans, acceptant les passe- droits, prêt à utiliser l'armée de la nouvelle Italie contre les déçus de l'ordre nouveau. Mais le cinéaste est plus dur avec don Calogero que le romancier. Ce qu'il supprime, c'est l'admiration réelle que don Fabrice éprouve, chez Lampedusa, pour l'intelligence de Sedara, pourtant si différente de la sienne. Par contre, il ne manque aucune occasion d'illustrer son ridicule et sa vulgarité. [...]
[...] Etude comparée du Guépard de Lampedusa et du Guépard de Visconti Cette comparaison entre les deux oeuvres s'articule autour des plans du découpage général, des thèmes historiques et personnels, et du style. Le découpage C'est sans doute sur ce point que le choix des deux artistes diffèrent le plus. Lampedusa a choisi dès le début de couvrir cinquante ans d'histoire, de Marsala à la veille de la Première Guerre . En huit chapitres, eux-mêmes nettement fragmentés en sous-chapitres, il exprime, par à-coups successifs, l'avancée du temps et des événements, la déchéance physique du prince et la décadence des Salina : le processus est lent durant six chapitres ( couvrant les années 1860-1862) et se précipite dans les deux derniers ( chapitre VII, mort du prince : 1883, chapitre VIII, la fin de tout :1910). [...]
[...] De cette manière, l'histoire donne l'impression d'avancer puis de reculer. Le temps ne progresse pas linéairement, mais par saccades, même si, en fin de compte, l'histoire, ce cauchemar dont le prince voudrait s'éveiller, a bien une réalité : Garibaldi avait finalement triomphé Au contraire, chez Visconti, depuis l'allegro maestoso de l'ouverture jusqu'au point d'orgue final, le récit progresse d'une seule mesure, par un enchaînement de séquences longues. Seule entorse à ce déroulement rectiligne : un montage parallèle entre le Cyclone amoureux et l'arrivée de Chevalley, et un faux flash back dans la scène de la demande en mariage. [...]
[...] Le chevauchement est constant de ces deux angles de vue, et tout y est signifiant : l'arrivée des invités avec son rituel de phrases creuses, les claquements de talons des officiers, les toilettes, les uniformes, les danses, les lustres et les murs dorés, le pavement de la salle de bal, le jacassement des guenons la démarche de canard de Sedara et son œil exorbité devant la splendeur qui s'offre à lui, le visage fermé de Concetta, assise et prostrée, éteinte par l'éclat d'Angélique qui se contemple au miroir savourant son triomphe, le mouvement continuel de Tancrède de groupe en groupe, son visage lisse et tendu vers l'avenir radieux ( ou nerveux quand son oncle danse avec Angélique), le prince, enfin, fatigué, démarche lente, visage blafard, qui observe dans le miroir sa propre dégradation physique à deux pas du cabinet où s'accumulent, pleins à ras bord, les vases de nuit. Mais c'est avec autant d'aisance que Visconti rend la brutalité des événements historiques, dans leur confusion et leur incohérence. Pour la bataille de Palerme, il refuse la mise en scène héroïque. [...]
[...] Si bien que la dernière image est ressentie comme la conclusion naturelle de cette sensation. Lampedusa tenait à montrer l'immersion définitive de l'aristocratie dans la nouvelle bourgeoisie, et devait donc insister sur la disparition du vieux monde incarné par Concetta ( dernière héritière des Guépards) un demi- siècle après l'ébranlement de 1860. Et si Visconti s'en est tenu aux années 1860-1862, c'est que, selon lui, elles sont le point géométrique de l'action le pivot à partir duquel tout bascule et commence à se dessiner le visage de l'Italie moderne. [...]
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