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Aron Raymond est un philosophe du vingtième siècle traitant particulièrement de philosophie politique, il est aussi économiste et sociologue, entre autres. Particulièrement polyvalent, il est passionné par les thèses de Marx et de Tocqueville, et par la question de la liberté plus généralement, ce qui le mènera à écrire l'essai dont nous allons étudier un extrait, Essai sur les libertés. L'extrait étudié constitue un commentaire qu'Aron Raymond fait sur la vision que Marx présente dans Le Capital, à propos du travail. Aron Raymond explique une partie des idées avancées par Marx vis-à-vis du fonctionnement du capitalisme, la question posée ici étant le fait que Marx expose une idée qui pourrait sembler paradoxale et selon laquelle une augmentation de la productivité n'entraînerait pas logiquement une augmentation du niveau de vie des travailleurs.
[...] Effectivement, s'il faut moins de temps pour produire les marchandises, alors la plus-value augmente puisque les ouvriers ont besoin de moins de temps et produisent plus et donc les patrons peuvent faire une marge supérieure, puisque les ouvriers sont payés à l'heure. Du point de vu de la logique formelle, la seconde proposition de Aron semble être une disjonction exclusive par rapport à la première, ainsi seulement l'une ou l'autre est possible, pas les deux en même temps. Donc, soit la plus-value augmente et les patrons font plus d'argent, soit le salaire permet d'obtenir plus de marchandises, puisqu'il suit la courbe de la production. [...]
[...] Toutefois ce que Aron Raymond veut pointer du doigt ici, c'est l'existence d'un paradoxe dans la pensée de Marx. Aron explique que Marx fait la différence entre un modèle statique et un modèle dynamique. Un modèle statique peut être compris ici comme un modèle économique qui fonctionnerait de façon figée, qui ne s'adapterait pas aux changements matériels de la réalité, et qui donc serait voué à s'effondrer dès que la réalité n'est pas adaptée au modèle économique. Marx montre que la capitalisme est dynamique car effectivement, il s'adapte à la réalité et à l'augmentation des moyens de production, aux évolutions technologiques qui bouleversent la façon de travailler des ouvriers, de façon à toujours produire plus. [...]
[...] Si, grâce à l'élévation de la productivité, les heures de travail nécessaires pour produire les marchandises représentant la valeur du salaire diminuent, de ce fait, ou bien le taux d'exploitation doit augmenter ou bien le salaire, sans représenter une valeur accrue, doit être incarné en une quantité accrue de marchandises. Marx n'a pas affirmé que le taux de l'exploitation augmentait, il a dit que ce taux demeurait stable. Il aurait dû reconnaître que la même part de la journée étant consacrée à produire une valeur équivalente à celle du salaire et la productivité ayant augmenté, le niveau de vie devait tendre à s'élever ou la pauvreté à s'atténuer. [...]
[...] Effectivement, la conclusion de Marx peut sembler paradoxale car, si jamais le capital augmente, les conditions de production s'améliorent, les ouvriers produisent plus en moins de temps et les patrons ont plus d'argent car produisent plus de biens, effectivement les ouvriers devraient être payés plus. C'est ce que Aron va tenter de nous expliquer dans la seconde partie de son argumentation. Il fait ici référence au système de Ricardo selon lequel le travail à une valeur, et cette valeur inaliénable du travail détermine la valeur des biens produits. Cette valeur du travail prend en compte la quantité du travail aussi bien que sa qualité, ainsi une heure de travail d'une qualité moindre a une valeur supérieure à une heure de travail d'une grande qualité. [...]
[...] Essai sur les libertés - Aron Raymond (1965) - Comment se fait-il que Marx aboutisse à une autre conclusion et quel est l'avis de Raymond sur cette vision ? « En une économie fondée sur la propriété individuelle des moyens de production, il n'était pas inconcevable que les richesses fussent concentrées à la disposition d'une minorité sans que le grand nombre en tirât profit (il en a été ainsi maintes fois). Il n'en reste pas moins un paradoxe. Nul économiste n'a été, au siècle dernier, aussi attentif que Marx au dynamisme de l'économie moderne, nul n'a répété aussi obstinément qu'un modèle statique était éloigné du réel et que le capitalisme se définit par l'accumulation du capital, donc par le développement des forces productives et, indirectement, par l'amélioration de la productivité. [...]
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