Nous sommes, pour la plupart, persuadés qu'il faut donner la priorité à nos désirs plutôt qu'à la raison et que la vie est trop courte pour que désirs et plaisirs soient sacrifiés.
Descartes, dans notre extrait, semble occupé à mettre cette opinion commune en question. Il semble s'être demandé si elle était pertinente. Faut-il vraiment s'épargner le détour par la raison si l'on veut parvenir au bonheur ici et maintenant ? La recherche du bonheur exige-t-elle vraiment qu'on privilégie les désirs ou passions au détriment de la raison ? Quelle place, donc, faut-il donner à la raison dans notre vie ? Tel est le problème que le texte aborde.
[...] Descartes (1591-1650), Lettre du premier septembre 1645 à Élisabeth Nous sommes, pour la plupart, persuadés qu'il faut donner la priorité à nos désirs plutôt qu'à la raison et que la vie est trop courte pour que désirs et plaisirs soient sacrifiés. Descartes, dans notre extrait, semble occupé à mettre cette opinion commune en question. Il semble s'être demandé si elle était pertinente. Faut-il vraiment s'épargner le détour par la raison si l'on veut parvenir au bonheur ici et maintenant ? [...]
[...] Distinguons chacune des étapes de cet enchainement. Le premier effet de la passion, c'est qu'elle nous détermine à agir en vue de la satisfaire. Les passions, comme l'écrit Descartes, exigent qu'on prenne bien de la peine à les acquérir c'est-à-dire à acquérir leur objet. Ceci n'est pas un problème en soi. Tout ce que nous recherchons demande un effort ; rien ne vient au-devant de nous par la seule force de notre esprit. Il faut toujours dépenser de la force, de l'énergie, du temps, etc. [...]
[...] Descartes ne veut rien dire d'autre quand il écrit (l.8 à 10) que la raison doit intervenir afin que nous ne manquions jamais d'employer tous nos soins à tâcher de nous procurer ceux qui sont, en effet, les plus désirables Mais tout ceci signifie implicitement que la raison doit contribuer au bonheur en opérant un tri parmi les désirs. Le raisonnement de Descartes implique que seuls les désirs de biens véritables et accessibles doivent être suivis si nous voulons parvenir au bonheur. Cela implique à son tour que les autres désirs doivent être supprimés. Descartes ne préconise donc pas de suivre la raison au détriment des désirs et en cela il se distingue des Stoïciens. [...]
[...] Il nous pousse à rechercher un bien dont on attend la plus grande satisfaction. Mais, justement, Descartes précise d'emblée qu'elle nous fait croire certaines choses beaucoup meilleures et plus désirables qu'elles ne sont (l.1-2). Ce n'est pas toujours le cas, mais presque : c'est le plus souvent, donc de manière générale, que la passion exagère la valeur de son objet. Elle l'embellit, le pare de qualités plus grandes que celles qu'il possède vraiment ; elle peut aller jusqu'à lui en prêter de fictives. Pourquoi ? Descartes, ici, ne le dit pas. [...]
[...] Profiter pleinement de cette vie nécessite le recours à la raison ; c'est parce qu'elle est courte et que nous n'avons pas de temps à perdre, qu'il faut réfléchir et choisir nos désirs. Alors, nous éviterons bien des déceptions. Mais nous apprendrons aussi à être contents de nous-mêmes. À la question de savoir si la recherche du bonheur justifie qu'on privilégie d'emblée et instinctivement nos passions sans consulter la raison, Descartes répond donc négativement. Pour lui, c'est au nom du bonheur qu'il faut accorder une grande place à la raison, ce temps de réflexion n'étant justement pas perdu. [...]
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