« L'homme est un loup pour l'homme » est la phrase souvent utilisée pour évoquer la nature profondément égoïste, associable, voire cruelle, de l'être humain envers ses congénères. Mais dans ce cas, d'où provient la société ?
Comment expliquer que nous en ayons besoin ? Alain dans ce texte réfute l'idée courante selon laquelle le besoin de société se greffe sur la nécessité de produire tout ce dont l'homme a besoin et qu'il ne peut assurer seul (...)
[...] La thèse de Marx donnant la primeur à l'Économique n'est donc pas évincée totalement. Conclusion Alain fait de la peur le mobile psychologique et naturel fondateur de la société. Il montre bien également la tension interne à chacun entre soif de liberté et goût pour la sécurité par les lois. Mais la peur n'est-elle pas aussi une donnée sociale et politique ? N'y a-t-il pas des régimes qui, sous couvert de protection, entretiennent la peur des citoyens envers eux- mêmes ou envers des ennemis supposés ? [...]
[...] Mais Alain ne s'arrête justement pas à cette thèse La place du politique À la tentation de l'évidence première, Alain oppose la probabilité plus rationnelle. Celle qui dissocie le besoin de s'organiser socialement du besoin pour chacun de manger. Il y aurait même antériorité de l'un sur l'autre. Cela ne signifie pas qu'il faut d'abord être en société pour ensuite pourvoir à ce type de besoins, car on a justement vu dans ce cas le rapport moyen-fin entre société et alimentation. [...]
[...] La nature et le climat y sont tels qu'il suffit étendre la main pour se nourrir. La culture y est telle que les vêtements ne sont pas prisés. Et pourtant il y a bien société et même structure complète et complexe de société : religion des prêtres administration et justice des institutions, des lois, une police pouvoir politique des rois Ce n'est donc pas l'organisation du travail, mais l'organisation politique en tant que telle qui est voulue La société sans économie La conséquence en est pour Alain que l'homme est citoyen par nature Il l'est en effet par héritage national, par éducation, car le comportement citoyen se façonne et les institutions s'apprennent, notamment à l'école, mais il l'est avant tout par nature, et non pas selon les circonstances artificielles ou accidentelles qu'il rencontre. [...]
[...] Ils sont par origine militaire. Ils ont pour objectif la sécurité. Hobbes l'a bien relevé en faisant du pacte social la conséquence de la crainte de chacun contre chacun à l'état de nature. On peut même comprendre ainsi pourquoi la société évolue vers des structures totalitaires dans lesquelles les citoyens sont toujours plus surveillés, comme le montre Foucault. De façon plus particulière, elle révèle aussi la limite de la vision de Rousseau sur l'état naturel de l'homme qui se passe, selon lui, de société. [...]
[...] Autre conclusion : la production des biens matériels n'est pas ce qui rend à l'origine l'homme dépendant des autres. Ce n'est pas le domaine où se repère sa plus grande faiblesse. Autrement dit ce n'est pas le premier des besoins car par besoin, il faut entendre dépendance et soumission à ce qu'on n'a pas décidé par soi-même. Or, se nourrir sans peine sans effort, est possible. On l'a vu dans l'exemple plus haut. C'est même ainsi que Rousseau décrit l'état de l'homme sauvage en général dans Le Discours sur l'origine de l'inégalité. [...]
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