L'objectif de ce travail d'analyse est de mettre face à face deux représentations d'un mythe. Jason, de Gustave Moreau et le sonnet Jason et Médée de José-Maria de Heredia mettent en scène le couple hérité de l'Antiquité classique. Ces deux personnages sont représentés dans toutes sortes d'œuvres littéraires relevant du genre dramatique, poétique ou romanesque, mais aussi dans un grand nombre d'œuvres iconographiques (amphores, fresques, peintures). Nous retrouvons le couple maudit sur la scène de l'opéra et sur les écrans du cinéma.
La figure de Médée est donc largement inscrite dans notre culture, sans doute avec davantage de force que celle du frêle et faible Jason.
Pour cette étude, nous avons choisi de nous appuyer sur une sélection de représentations : Nous parlerons d'une Médée et d'un Jason tels que nous les connaissons à travers les récits du mythe des auteurs suivants : Euripide, Sénèque, Ovide, Corneille et Christa Wolf (auteurs cités dans la bibliographie). Même si les représentations du couple sont bien plus nombreuses et présentes dans pratiquement chaque siècle, nous nous bornerons aux auteurs cités.
Il s'agira ici d'étudier les rapports qui existent entre l'œuvre de G. Moreau et celle de J-M. de Hérédia, savant tissage entre un sonnet dédié au peintre et une peinture dite « littéraire »…
Nous nous attacherons tout d'abord à éclairer les détails du mythe représenté ainsi qu'à évoquer ce qui est à peine sous-entendu par le peintre et le poète.
Puis, la démarche analytique se portera sur la représentation d'une violence retenue.
Enfin, nous clôturerons cet ensemble de réflexions sur les influences de Hérédia dans ce sonnet, influences de plusieurs tableaux de Moreau.
[...] Effectivement, on ne peut nier l'influence de Moreau sur Hérédia. Mais la toile n'a pas été la source exclusive d'inspiration pour le sonnet. C'est dans cette fin de siècle que l'on s'est mis à réinventer la femme fatale angoissante et provocante. Moreau l'a montrée sous bien des aspects parée d'un luxe délirant et parfois érotique. Hérédia reprend cette figure mystérieuse de la féminité à travers le personnage de Médée, la fatale Epouse Tout comme chez Moreau, pour une grande part de son œuvre, le goût de l'hellénisme est très marqué. [...]
[...] En arrière plan, on aperçoit ce qui pourrait avoir inspiré les lacs d'argent où pleuvait l'azur des cieux Ici il ne s'agit plus de mythe mais davantage de rêves. A partir de 1880, Moreau donne plus souvent libre cours à son inspiration onirique, les scènes imaginaires sont librement inspirées de tapisseries gothiques contant la vie médiévale, ou bien d'images toutes personnelles On retrouvera encore les grands oiseaux sur la toile Jupiter et Sémélé (1895) ainsi que dans Hercule au lac Stymphale (1875). [...]
[...] Moreau peint les deux amants au début de leurs aventures. Jason, au premier plan, vient de s'emparer de la Toison d'or grâce à l'aide de Médée, située au second plan. Hérédia décrit davantage l'atmosphère qui règne autour des deux amants. Jason, dont le nom reste absent du sonnet, s'est déjà emparé de l'illustre Toison Médée mène déjà la danse, ses attributs sont plus visibles que dans la peinture de Moreau où son caractère n'est pas rendu. Fureur jalouse, philtres d'Asie et ancêtres divins sont convoqués en fin de sonnet. [...]
[...] Lorsque les troupes de son père se lancent à leur poursuite, elle le tue et le coupe en morceaux. Le père effondré prend du retard dans la course en ramassant les membres épars de son fils. Argo et Médée sont déjà loin. Tous ces crimes sont commis par amour pour Jason. La jeune colchidienne demeure toujours une étrangère, une fille barbare au milieu des grecs. Elle emporte avec elle une fureur, une violence que les poètes ont su parfaitement rendre dans de magnifiques tirades. Les crimes continueront dans une sorte de spirale sans fin. [...]
[...] Est-ce par ironie que Moreau a intitulé le tableau Jason ? Que dire du poème de Hérédia ? Le Héros la suivait et secouait les éclairs de l'illustre Toison Pâle représentation d'un héros de la Grèce antique, mené par une femme amoureuse et autoritaire . Une violence à peine contenue Il paraît donc évident que ces deux artistes du XIX e siècle aient choisi de représenter un mythe de l'Antiquité classique en utilisant une certaine subtilité qui permettait d'allier les caractères représentés et les canons esthétiques d'une époque qui était la leur. [...]
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