La publicité de notre temps « il faut éliminer » qui vante les mérites de l'eau minérale, vecteur de santé qui élimine les toxines et déchets découle des pratiques du Moyen Âge issus de deux constats. D'abord l'entretien du corps et la préservation envers le mal ne datent pas de l'époque contemporaine. Les démarches anciennes visaient déjà à activer les organes et à les préserver de toutes atteintes extérieures. Ensuite la volonté d'épurement a traversé le temps, habitée par la crainte des déchets qui menacent le corps de décomposition, les images de force traversant le temps : celle apportée par la nourriture ou les boissons, celle apportée par l'exercice physique, le régime de vie et les produits pharmaceutiques. Ce qui implique deux principes de force et d'épurement qui commandent l'entretien du corps. Cependant des superstitions demeurent. Les objets précieux ou de valeurs protègent des différents maux ambiants.
La saignée, démarche d'entretien préventive qui vise devint obsolète à la fin du XVIIIe siècle. Le travail sur le sensible vise des objets infâmes : sécrétions discrètes, rejets cachés par exemple. Un travail sur le danger vise aussi de nouveaux risques avec les toxines, les microbes ou les impuretés infectieuses.
[...] Et c'est autour du travail et de ses dangers que naissent ces assurances modernes. IV. La force de soi, la force des autres XIXe siècle Chapitre 1 (199-218) Espace intime et espace public Les causes des épidémies au début du XIXe siècle ne sont plus attribuées ni à l'air ni aux eaux dormantes, ni aux vents, ni aux rues étroites, ni aux lieux confinés, mais aux négligences des classes ouvrières et des morts nombreuses parmi les ouvriers en début de semaine après les excès dominicaux. [...]
[...] Les airs et les souffles du corps gagnent une existence plus diffuse, plus variée. Le mot vapeur étend son sens au XVIIe siècle. Elle provoque des suffocations, étouffements, vertiges. Les vapeurs désignent aussi les fumées qui s'élèvent de l'estomac ou du bas-ventre vers le cerveau Pour éviter ce mal, on déploie le spectre défensif. Au thème évacuateur auquel s'attachent les élites se côtoie la croyance des humbles aux solidarités cosmiques des astres. Les potions purifiantes abondent et se généralisent en même temps que se prolifèrent les almanachs de la santé. [...]
[...] La vérité sanitaire s'énonce dans l'identification des colonies bactériennes localisées et précises. Le danger se resserre. On découvre que l'ennemi, c'est le microbe. On crée un vaccin répondant à chaque microbe pour éviter toute infection. Les travaux de la microbiologie multiplient les craintes malgré que le danger soit focalisé, isolable. On propose un ensemble de pratiques pour contenir la propagation des microbes. La peur du microbe prolonge la mentalité nouvelle. Les espaces sanitaires sont touchés par la révolution pastorienne. Les constructeurs utilisent des matériaux lavables, des tuyauteries et des appareils distributeurs qualifiés de plomberie d'eau pour pallier aux déficiences des canalisations intérieures. [...]
[...] Unique en son genre, l'épidémie mélange le sang, le sexe et la mort, mais elle nous dévoile un des aspects de nos sociétés. En effet, les premières informations données de la maladie sont semblables à l'infection des catastrophes anciennes, telles la peste et la lèpre. Le scénario du fléau lié aux croyances et aux illusions semble excessif : le virus du sida peut se transmettre par le combiné téléphonique, la poignée d'un chariot de supermarché ou d'une lunette de W-C. [...]
[...] Par exemple l'Express et le Point dans leurs éditions de 1985 titrent respectivement : Faut-il avoir peur du sida ? et Psychose ou réalité. Sida : faut-il avoir peur du sexe ? Malgré cette assurance affichée par l'Express et le Point le Monde rappelle en 1990 : Nous devons nous considérer en état de guerre et en 1992, le Parisien libéré annonce des prévisions catastrophiques Face à cette panique, les autorités ont créé des organismes aux responsabilités complémentaires pour juguler le fléau. [...]
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