En 1896 débutaient les premières tentatives de traitement des cancers par les rayons X. En un siècle, cette technique de traitement, qui prendra le nom de «radiothérapie», a atteint un haut degré de sophistication technique. Utilisée chez un malade cancéreux sur deux, elle s'intègre actuellement dans des stratégies thérapeutiques complexes, multidisciplinaires, impliquant de façon variable les deux autres armes dont nous disposons pour lutter contre le cancer : la chirurgie et la chimiothérapie. En 1996, un cancéreux guéri sur deux doit sa guérison, en tout ou en partie, aux effets bénéfiques des rayons X.
C'est le 28 décembre 1895 que Wilhelm Conrad Röntgen présente à la Société de physique de Wurzburg une communication historique : la découverte d'un nouveau type de rayonnements doués de propriétés assez extraordinaires. Grâce à eux, Röntgen avait été capable, six jours auparavant, de «photographier» les os de la main de son épouse; ce fut la toute première radiographie. À ce moment, Röntgen, ne connaissant pas l'origine exacte de ces rayons les nomma X, symbole de l'inconnu en mathématiques.
[...] Mais en 1950, les appareillages disponibles ont encore des performances limitées. L'introduction de nouvelles technologies va révolutionner la radiothérapie. VIII) L'ère moderne : 1950-1980 En quelques années, la radiothérapie conventionnelle fondée sur les tubes à rayons est supplantée par la radiothérapie dite de haute énergie avec l'arrivée des bêtatrons (le premier est installé à l'institut Gustave‑Roussy de Villejuif, en 1953), des appareils de télécobalt, improprement appelés bombes au cobalt (le premier est également inauguré à Villejuif, en 1955), et des accélérateurs linéaires à usage médical (développés dans les années 1960). [...]
[...] Enfin, une véritable révolution s'opère en curiethérapie grâce à l'introduction des radioéléments artificiels. En 1936, Irène et Frédéric Joliot‑Curie découvrent la radioactivité artificielle, et le premier réacteur nucléaire de recherche français (la pile ZOE) est opérationnel en 1948. De nouveaux éléments radioactifs, artificiels, deviennent disponibles, dont l'iridium 192 et le césium 137 qui détrônent rapidement le radium. La miniaturisation extrême de ces sources rend moins traumatisantes les applications, et la radioprotection est beaucoup plus facile à mettre en œuvre (chargement différé, télécommandé, des radio‑isotopes artificiels, dans des applicateurs non radioactifs placés au niveau des tumeurs). [...]
[...] Cette adaptation extrêmement sophistiquée de la balistique de l'irradiation a déjà permis de réduire de façon significative la toxicité de la radiothérapie dans certaines indications, et est en passe de devenir le traitement de référence pour quelques localisations tumorales spécifiques, comme le cancer de la prostate ou les tumeurs cérébrales. Par ailleurs, la radiothérapie s'intègre de plus en plus étroitement dans des protocoles multidisciplinaires. Les diverses techniques de traitement des cancers sont en fait éminemment complémentaires. Ainsi, l'association optimale d'une chirurgie limitée (exérèse de la tumeur seule) et d'une irradiation post‑opératoire permet le traitement dit conservateur du cancer du sein. [...]
[...] IV) Les déceptions Malgré des succès ponctuels, les pionniers de la radiothérapie ne peuvent cacher une certaine déception, car la majorité des tumeurs traitées ne répondent pas au traitement, ou seulement de manière transitoire. En fait, les rayons utilisés à cette époque, qu'ils proviennent des tubes à rayons X (les mêmes que pour la radiologie) ou du radium, ne pénètrent pas suffisamment les tissus pour atteindre les tumeurs profondes. Enfin, l'histoire naturelle des cancers est encore mal connue, et la radiobiologie, étude des interactions entre les rayonnements et la matière vivante, est quasi inexistante. [...]
[...] Après la guerre se retrouve à la section médicale de la Fondation Curie une équipe de cliniciens et de chercheurs qui établit des règles de prescriptions qui restent encore aujourd'hui à la base de la pratique quotidienne de la radiothérapie. Prenant le contre‑pied de certains groupes, notamment en Allemagne, qui prônent l'utilisation de très fortes doses d'irradiation délivrées en quelques séances, l'équipe de la Fondation Curie, avec les docteurs Regaud, Coutard et Lacassagne, montre que le rapport efficacité/toxicité des rayonnements est meilleur quand l'on fractionne l'irradiation en de nombreuses séances. Un schéma de référence est défini : 5 séances d'irradiation par semaine pendant 2 à 7 semaines, avec une adaptation de la dose selon le type de cancer. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture