L'objet de ce travail est avant tout un questionnement sur cette situation particulière qu'est l'accompagnement d'une personne en fin de vie à l'hôpital, arrivée au stade ultime de sa maladie.
Dans la multiplicité de ses acceptations, perceptions et interprétations, la souffrance est déterminante dans la représentation de la maladie et c'est sur elle que se basent les décisions en phase terminale. La souffrance est avant tout une expérience personnelle particulière qui touche la personne malade et peut induire chez elle le sentiment de perdre une part de son humanité. Quand la personne n'est plus que souffrance et que la maladie la rend dépendante des personnes qui l'entourent, c'est son autonomie qui est affectée : prendre des décisions, assumer son rôle social, entretenir des relations avec ses proches… sont autant d'activités essentielles à sa réalisation qui sont compromises.
[...] était conscient et capable d'écrire. Il aurait été possible, en prenant le temps de le faire, d'envisager un échange avec lui à ce sujet. Enfin, Emmanuel Hirsch souligne l'importance d'une prise de position de la part du soignant envers la personne qu'il soigne, c'est-à-dire adopter une posture, une attitude afin de pouvoir respecter un engagement, une fonction. Cette responsabilité du soignant face au patient caractérise une implication, un investissement de soi auprès de l'autre qui portent la clarté ou la clarification indispensable à sa confirmation d'être toujours digne de sollicitude et d'hospitalité dans l'espace relationnel qui lui est voué Cette position permet au soignant de définir ses propres limites et permet au patient de savoir ce que le soignant est prêt à mettre en œuvre pour l'accompagner dans cette étape difficile qu'est la fin de vie. [...]
[...] Les infirmières du service se sentent bien démunies face à la souffrance de leur patient. D'une part, parce que les analgésiques administrés ne semblent pas soulager vraiment sa douleur et que ses constantes physiques ne cessent d'empirer et d'autre part, parce qu'elles se rendent compte qu'elles ne peuvent apporter le soutien et le temps nécessaires pour prendre soin de lui jusqu'au terme de sa maladie. Elles se retrouvent confrontées à des contraintes institutionnelles et organisationnelles qui ne leur permettent pas de transférer le patient dans une unité de soins palliatifs où elles savent qu'il sera bien pris en charge et s'indignent face au refus de l'épouse du patient de prendre en considération l'option des soins palliatifs comme préférable pour son mari. [...]
[...] L'homme souffrant éprouve cette dimension de la condition humaine qui apparaît incompatible avec toute possibilité de la vivre. [ ] On comprend dès lors quelles logiques s'emploient à justifier l'acte de mort par l'incapacité humaine d'apaiser les souffrances réfractaires à tout traitement Dans un contexte où la biomédecine suscite promesses et espoirs et où l'avancée technologique permet de tenter l'impossible, il semble inacceptable d'envisager l'impuissance thérapeutique La mort met à mal une certaine idéologie, voire esthétique, de la médecine, elle devient inconvenante, déplacée, intolérable et engendre même une certaine répulsion. [...]
[...] D'une part, parce qu'il se trouve dans l'incapacité de mettre un terme à cette souffrance et d'apporter une consolation autre que compassionnelle et d'autre part, comme dans le cas de Monsieur M. parce qu'il est difficile de mesurer cette souffrance et l'impact qu'elle a sur sa personne étant donné qu'il ne peut plus parler ; il est donc difficile de lui permettre de se décharger un peu du poids de la maladie. L'épouse de Monsieur M. a beaucoup de mal à accepter l'idée de la mort prochaine de son mari et veut toujours envisager son hospitalisation comme un combat thérapeutique contre la maladie, malgré les explications des médecins. [...]
[...] L'épouse de Monsieur M. ne veut rien dire à son mari quant à sa situation clinique, par peur qu'il ne perde espoir, et continue à lui parler d'un retour prochain au domicile. Les infirmières du service sont dépassées par la situation : elles ne peuvent accorder toute la surveillance et l'attention nécessaires au patient, au vu de leur nombre restreint et insistent auprès du médecin et de l'épouse pour que le patient soit transféré en soins palliatifs. Certaines s'indignent de voir le patient souffrir à ce point et trouvent que l'épouse devrait demander au médecin d'accélérer les choses, pour qu'il parte en paix, dignement Faute de place en soins palliatifs, Monsieur M. [...]
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