Y-a-t-il une conscience animale ?

Résumé du document

Dans la presse récente, le lecteur attentif a peut-être pu prendre connaissance d'une proposition à première vue surprenante émanant de philosophes américains. Ceux-ci revendiquaient d'étendre les droits de l'homme à certains animaux supérieurs comme les chimpanzés bonobos et autres préhumains dans le genre Homo. Certes, plus personne ne s'étonne que certains citoyens américains très fortunés témoignent d'une adoration pathologique envers leurs animaux domestiques par exemple en élevant en leur mémoire de véritables mausolées. Mais, émanant du monde intellectuel réputé sérieux, cette demande a de quoi surprendre.

Pourtant, à y voir de près et pour peu qu'on ait la curiosité de suivre les développements de la pensée américaine qui domine les débats actuels sur la cognition, la demande des intéressés perd beaucoup de son caractère provocateur et prend même un air de légitimité. Searle rejoint les travaux d'anthropologie moléculaire qui étendent à 99,4 % du code génétique l'identité entre les espèces supérieures et l'homme. Cette quasi-identité supporte d'autres identités physiologiques et immunologiques. Cependant faut-il aller jusqu'à l'attribution d'une conscience ? C'est le franchissement de ce pas qu'il s'agit ici de mettre en discussion.

Extraits

[...] Comment définir davantage ce niveau faible de pensée ? Penser, c'est être capable d'identifier des objets, de les localiser, de les trier, par exemple à ce niveau entre hostiles/amicaux, comestibles/non comestibles, mâles/femelles ) ;d'observer leurs propriétés ; de mémoriser ces dernières, de planifier et de contrôler son comportement compris de se tromper) en fonction de leur présence et sur base des expériences passées. Pour réussir ces performances, qui se distribuent à des degrés divers dans le règne animal[18] , il faut postuler que l'individu bénéficie d'une représentation cohérente du monde interne. [...]

[...] Il a compris que l'image modifiée le représentait lui-même. On peut conclure qu'il a au moins conscience de son corps, à défaut d'avoir une conscience réfléchissante .Une possible implémentation biologique Edelman[20] a décrit les supports biologiques d'une conscience primaire dont les caractères viennent d'être énumérés. Sans entrer dans les détails, il suppose pour expliquer son fonctionnement la collaboration entre le cortex et ses appendices d'une part ; le système thalamique[21] qui intègre respectivement les influx des récepteurs sensoriels, les muscles et les comportements moteurs, de l'autre. [...]

[...] Pinker,L'Instinct du langage, Odile Jacob D. Pinkas, La matérialité de l'esprit, La Découverte D. et A. Premack, L'Esprit de Sarah, Fayard J. Proust, Comment l'esprit vient aux bêtes, Gallimard Les animaux pensent-ils Bayard Vocabulaire des sciences cognitives, P.U.F J. Searle, Du cerveau au savoir, Hermann F. Varela, E. Thompson, E. Rosch, L'inscription corporelle de l'esprit, Seuil J. [...]

[...] Simplement, il me semble qu'en l'état actuel des choses cette ligne de recherche est judicieuse et innovante. La perspective de la philosophie cognitive pas plus que celle de la phénoménologie ou celle du structuralisme n'est unitaire ou fixée en dogme ; elle rassemble des chercheurs dont les points de vue sont parfois même difficiles à harmoniser et font l'objet de débats passionnants. De cette discussion permanente nous invoquons comme preuve le Vocabulaire de sciences cognitives de O.Houdé, D.Kayser, O. Koenig, J. [...]

[...] Pour expliquer l'unité subjective de la conscience, il propose l'hypothèse d'un noyau dynamique qu'il situe comme d'autres dans la région thalamo-corticale. Malheureusement, l'imagerie cérébrale ne permet pas encore d'explorer ce qui se passe dans ces couches profondes. Lorsque cela sera rendu possible avec la finesse de définition nécessaire, on pourra sans doute pister à la trace la présence et l'évolution des états de conscience. L'anatomie de la conscience de type supérieur comporterait les mêmes caractéristiques avec en plus les aires d'idéation du langage parlé : les aires de Broca et de Wernicke qui permettent la formation d'une mémoire des symboles et la liaison entre l'apprentissage conceptuel et l'apprentissage lexical. [...]