“L'emprise de la télévision” est extrait de l'enseignement dispensé en 1997, par P. BOURDIEU titulaire d'une chaire de sociologie au Collège de France.
Ce sociologue engagé contre le néolibéralisme est l'héritier de la méthode et de la doctrine de Durkheim. Il commence sa carrière par une étude sociologique de la culture, notamment de la transmission culturelle en collaboration avec Jean-claude PASSERON dans les Héritiers. Puis il s'oriente vers l'examen des clivages sociaux au travers de comportements spécifiques. Né en 1930, il décédera en février 2002.
P. Bourdieu, dans ce texte critique le monde des médias qu'il juge soumis à une logique commerciale et économique.
La lutte pour l'audimat, liée à la concurrence, induit des conséquences nocives qui sont souvent attribuées aux seuls journalistes.
En réalité la soumission au diktat de l'économie du monde de l'information constitue une censure invisible qui va jusqu'à travestir la réalité et menace les sphères de la production culturelle.
Il a voulu mettre en évidence les mécanismes sociaux de l'univers du journalisme de télévision. Il souligne que ces mécanismes menacent les différentes sphères de la production culturelle et plus fondamentalement la démocratie.
La science sociale contribue à la conscientisation émancipatrice vis à vis de ce ”champ hétéronome”.
Elle apporte aux professionnels de la télévision les outils pour faire obstacle à l'exploitation amorale de l'information dans l'exercice de leur métier.
L'utilisation des masse-médias se révèle un dangereux outil de manipulation de l'opinion, influençant fortement des champs sociaux comme la justice ; même si elle est parfois utile pour rétablir la démocratie. Certes, P.BOURDIEU dédouane les journalistes des contraintes qu'ils exercent et auxquelles ils sont eux-mêmes soumis ; Il leur propose des clefs pour exercer leur métier dans le respect de l'éthique et de la démocratie.
Mais c'est pour mieux dénoncer “l'emprise “ du commercial.
Le sociologue postule que le colossal pouvoir économique et idéologique infléchit dans un sens conforme à ses propres intérêts les orientations générales du monde des médias et des produits culturels. Il défend l'autonomie du champ de la production culturelle quelle qu'elle soit. A terme c'est le problème de son autonomie et plus fondamentalement celui de la démocratie du Savoir qui est posé. La médiatisation établit une labellisation dont la cotation artificielle sous-tend des stratégies individuelles et mercantiles. L'anti-intellectualisme patent du milieu journalistique menace la reconnaissance de nouveaux talents, influençant les maisons d'édition.
La sociologie, détournée délibérément de ses fondements initiaux, sert d'alibi à ces pratiques.
Commentaire :
La question de l'indépendance de l'information télévisuelle soulevée dans ce texte par P.B se pose aujourd'hui avec acuité du fait de sa dépendance croissante au monde économique, (I) et d'une influence sur l'ensemble des champs sociaux.(II)
[...] Sur le fond sa critique a bien mis en évidence les contraintes qui s'exercent sur eux. Il n'apporte aucun d'élément vraiment nouveau sur leur métier, ni sur l'aspect prêt à penser de ce média. A l'heure de la mondialisation des médias, les propos alarmistes abondent pour dénoncer l'emprise exercée sur le monde des télécommunications par de véritables structures oligopolistiques. Des risques importants en découlent : soumission de l'information de plus en plus assimilées par l'idéologie dominante à des intérêts économiques et politiques, et nivellement par le bas des produits culturels. [...]
[...] Mais c'est pour mieux dénoncer “l'emprise du commercial. Le sociologue postule que le colossal pouvoir économique et idéologique infléchit dans un sens conforme à ses propres intérêts les orientations générales du monde des médias et des produits culturels. Il défend l'autonomie du champ de la production culturelle quelle qu'elle soit. A terme c'est le problème de son autonomie et plus fondamentalement celui de la démocratie du Savoir qui est posé. La médiatisation établit une labellisation dont la cotation artificielle sous-tend des stratégies individuelles et mercantiles. [...]
[...] Quelques journalistes ont brillamment réussi leur parcours. Ils sont devenus des élus au service de la démocratie : D. BAUDIS, P. de CAROLYS, N.MAMERE, H.SANNIER. On peut se demander s'ils auraient entamé une carrière politique sans la fréquentation de ce milieu, et sans leur savoir- faire de journalistes et d'hommes de communication. Le journaliste de télévision est censé partager l'éthique de son employeur. Il existe d'ailleurs une clause de conscience qui lui interdit de nuire à son entreprise, aux financeurs ou aux dirigeants du groupe. [...]
[...] Le développement rapide des nouveaux médias internet et jeux vidéo n'a pas réussi à ralentir la consommation télévisuelle, qui a encore progressé dans le monde en moyenne de 7 minutes par jour et par individu, avec une moyenne de plus de trois heures et demi par jour. La place de l'audimat est croissante. Les résultats d'audience, sont partout présents : affichés dans les ascenseurs et les couloirs des chaînes de télévision, publiés dans la presse quotidienne et spécialisée. Les parts de marché en dépendent. [...]
[...] Elle reste en effet le symbole du pouvoir, de la centralisation et de L'Etat. Cette remarque a quelque fondement historique. En France la ligne directe entre la direction de l'information des chaînes de radio et de télévision et le Ministre de l'information a bien existé jusqu'en 1981. Aujourd'hui encore trente six personnes parmi les hauts responsables de l'audiovisuel public ont un poste de téléphone interministériel dit RIMBAUD(réseau interministériel de Base Uniformément Durci) et peuvent être en liaison permanente directe chiffrée et donc inécoutable avec le Président de la République, les ministres, les préfets et leurs collaborateurs. [...]
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