« La messe est à vingt heures, tous les jours. C'est la liturgie du grand prêtre. Celle-ci est parfaitement agencée, notamment par le choix efficace et symbolique du moment du repas familial, favorisant le gavage par le monologue de l'humanoïde borgne dans le silence coutumier. ». L'analyse pour le moins critique et vitriole du grand journal cathodique quotidien par le philosophe Yannis Youlountas et ne laisse aucun doute quant au parallèle établi entre le « 20 heures » et le rituel dominical, et en particulier concernant l'impact hypnotique et religieux que les deux évènements produisent.
Depuis le 29 Juin 1969, et le premier des Papes des JT Pierre Sabbagh, le grand journal du soir a connu une évolution qui n'a cessé d'épouser les mutations de la société. S'ils n'étaient au départ que quelques milliers de curieux érudits, la population des spectateurs s'est changée en une masse hétérogène de fidèles qui se comptent par millions. Le « 20 heures » ne s'adresse à aucun groupe social mais bien à tous ; comme s'en vantent les religions chrétiennes qui se veulent universelles. Car finalement, ces deux rendez-vous fondent leur succès et leur influence sur leur capacité à rassembler, et c'est de cette responsabilité du spectateur que se naissent les critiques de ce programme à part.
Il n'est pas non plus difficile, pour celui qui porterait un peu d'attention, de relever les nombreuses similitudes qu'il existe entre une messe dominicale et le journal télévisé du soir, en particulier pour le mot « rituel » qui prend ici toute sa signification. Ce qui parait moins évident en revanche est le contenu de cette parole cathodique : quel est le message que tente de prêcher les pseudo journalistes devenus égéries d'une tranche horaire ? L'information est-elle toujours pertinente, voire même existe-t-elle encore ?
Il est certain que le journal de 20 heures présente des caractéristiques évidentes du rite religieux, et ainsi, de nombreuses similitudes avec la messe sont à noter et à étudier étroitement, notamment afin d'expliquer cet engouement généralisé. Pourtant, si le JT a l'apparence d'une messe, il semblerait cependant, qu'il soit victime de son succès, écrasé entre le diktat publicitaire et les attentes d'une foule de fidèles né sous l'ère de la consommation sous toutes ses formes
[...] Le cas le plus représentatif est celui de la présentatrice du 20 heures Béatrice Schoenberg qui a dû quitter ses fonctions, dans un souci d'objectivité de l'information. Mais on peut aussi se demander si tout cela n'est pas une mise en scène, car la vraie question est de savoir si le journaliste est réellement en mesure d'exercer une influence sur le contenu de l'information, quand on observe une aseptisation constante du journal de 20 heures ? Le véritable problème de l'information du journal de 20 heures est donc son aspect consensuel extrême qui ne produit rien d'autre qu'une carence réelle de l'information. [...]
[...] C'est une musique qui ressemble à une marche militaire, peut-être plus rapide et plus stressante. Certains pourraient y voir l'annonce de l'évangile ou encore l'ouverture de la messe, mais pour la plupart des spectateurs, elle annonce simplement le début d'un rituel quotidien qu'est le journal télévisé. Les couleurs sombres sont de mises, à dominante grise, rouge et bleue, afin de suggérer innocemment le drapeau français et créer un sentiment fort de communauté nationale, cette communauté qui se réunit tous les soirs pour se tenir au courant des informations. [...]
[...] En d'autres termes, le journal doit intéresser l'ensemble des spectateurs tout en prétendant fournir l'essentiel de l'information : ce qui doit être connu est dans le journal, comme si ce qui n'était pas cité, importait peu. Et c'est peut- être cela qu'implique aussi la critique du 20 heures : la messe est dite, suivie par des millions de fidèles lobotomisés et persuadés de connaître la situation politique nationale et l'actualité internationale en quelques minutes. Ainsi écrit Yannis Youlountas : L'image étant un investissement particulièrement rentable, il semble que son succès lui confère de régner au-dessus de la réalité des êtres et des choses. [...]
[...] la télévision, la messe est dite chaque soir". Qu'en pensez-vous ? La messe est à vingt heures, tous les jours. C'est la liturgie du grand prêtre. Celle-ci est parfaitement agencée, notamment par le choix efficace et symbolique du moment du repas familial, favorisant le gavage par le monologue de l'humanoïde borgne dans le silence coutumier. L'analyse pour le moins critique et vitriole du grand journal cathodique quotidien par le philosophe Yannis Youlountas et ne laisse aucun doute quant au parallèle établi entre le 20 heures et le rituel dominical, et en particulier concernant l'impact hypnotique et religieux que les deux évènements produisent. [...]
[...] Les réactions ont été immédiates et très fortes provoquant un vent de panique dans le pays. Cela a montré d'une part, le manque total d'esprit critique de la part des spectateurs (il semblerait que certains détails montraient qu'il s'agissait bien d'un canular) mais surtout de l'impact du journal du soir sur les fidèles : à 20 heures, la messe est réellement dite. Le journal de 20 heures, par le nombre de personnes qu'il rassemble ne peut nier la responsabilité qui lui incombe. [...]
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