Beethoven n'a composé qu'un seul opéra, auquel il a consacré beaucoup de temps. Entre 1805 et 1814, il révisa trois fois la partition et fit remanier le livret, notamment à cause du manque de succès des représentations.
Fidelio est aujourd'hui perçu comme un opéra politique : la scène de la (courte) libération des prisonniers de leurs cachots est l'exemple le plus évoqué de cette dimension politique. Mais quelle en est véritablement la portée ? Fidelio n'est-il pas avant tout un éloge de l'amour conjugal ? Beethoven, dans une vision humaniste, rapproche l'amour de l'amitié et de la fraternité, et c'est dans ce sens que nous tâcherons d'appréhender le caractère politique de cet opéra...
[...] Fidelio est un opéra qui est aujourd'hui beaucoup joué, dans le monde entier. Au fond, on peut tout à fait penser que la valeur humaniste de l'opéra n'a jamais cessé d'être d'actualité. Prenons l'exemple d'une interprétation récente au Théâtre du Chatelet à Paris. Simon Rattle dirigeait l'orchestre, avec une mise en scène de Déborah Warner. L'univers de la prison y était représenté comme un monde du bruit et de la fureur, brutal et sinistre, où les maîtres de la prison ne jouissaient pas d'horizon beaucoup plus gais que ceux de leurs captifs, tant les grillages et les classeurs métalliques paraissaient enfermer et comprimer tout l'espace. [...]
[...] C'est cette foi qui, au dernier moment, la pousse à s'interposer et à risquer la mort à coup sur. L'amour conjugal, que Beethoven n'a d'ailleurs jamais connu (il a pourchassé toute sa vie à travers des lettres une mystérieuse inconnue dont on n'a jamais su l'identité), est en fait la seule force directrice de l'opéra, qui est à la source de toutes les tensions : le travestissement de Fidelio, l'amour impossible de Marcelline, l'amitié ambiguë avec Rocco. C'est uniquement la volonté intransigeante de l'amour de Fidelio pour Florestan qui rend possible le salut des personnages : l'erreur judiciaire et politique est réparée, le mensonge cesse et l'amitié gagne. [...]
[...] Cette histoire édifiante lui avait servi d'argument pour un livret d'opéra héroïque à la Chérubini (que Beethoven aimait beaucoup) mis en musique par Pierre Gaveaux en 1798. Avant la première représentation de 1805, d'autres compositeurs se sont emparés du sujet : Fernando Paër en 1804 avec Eleonora ossia l'amore conjugale et Giovanni Simone Mair en 1805. L'insuccès de la première représentation à Vienne en 1805 est expliquée en partie, à part les problèmes liés à la surdité grandissante de Beethoven qui tenait à diriger l'orchestre, par le fait que la majorité des spectateur étaient des officiers français occupant Vienne qui comprenaient mal l'allemand. [...]
[...] Il y a principalement trois grands symboles du message politique dans l'opéra. Les prisonniers : ce premier symbole de l'oppression et de l'enfermement est évident, mais il faut tenter de le définir. Le caractère grandiose de la scène où, à la fin du premier acte, les prisonniers goûtent un instant la chaleur du soleil mérite que l'on rappelle leurs paroles : la vie n'est nulle part aileurs, et nos cachots sont des tombeaux la fin de Léonore, c'est-à-dire la première version de l'opéra en 1805, Rocco désarme Léonore et accompagne Pizzaro dans la cour, tandis que les prisonniers, sous terre, poussent des cris de vengeance. [...]
[...] Mais à cet instant retentit du haut de la tour la trompette annonçant l'arrivée du ministre. Florestan est sauvé. Les deux époux sont ivres de bonheur. La dernière scène a lieu sur la place d'armes du château, couverte de prisonniers et de gens du peuple qui fêtent l'arrivée du ministre. Celui-ci est heureusement surpris de revoir son ami Florestan, qu'il croyait mort. Léonore peut défaire les chaînes de Florestan et l'opéra s'achève sur un chœur de réjouissances de toute l'assemblée. [...]
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