Quels sont les liens entre les médias et le terrorisme ?

Thèmes abordés

Média, terrorisme, médiatisation du terrorisme, objectivité, spectacularisation, rhétorique de la mise en scène, climat anxiogène, manipuler l'opinion publique, médias pro-terroristes, Moscovici

Résumé du document

Selon son étymologie, un média est un «moyen», au sens de moyen de transmission, de diffusion. Différents organes peuvent relever de cette définition : la presse, la télévision, la radio, internet. Toujours selon son étymologie, le «média» est ce qui est au centre, au milieu. Il est donc au milieu des personnes à informer et des événements à relater.
Ces événements peuvent être de plusieurs types, mais nous nous intéresserons plus particulièrement au terrorisme. Les médias sont donc cet organe entre les événements et les terroristes, ces personnes qui infligent la terreur, adoptant une «attitude d'intolérance envers d'autres idéologies que les leurs».

Extraits

[...] Il est donc intéressant de se demander quels sont les liens entre les médias et le terrorisme. Nous découvrirons d'abord leur lien intrinsèque Puis, nous expliquerons en quoi médias et terroristes partagent un goût pour le sensationnel (II). Nous étudierons ensuite les effets pervers de la médiatisation du terrorisme (III). Enfin, nous évoquerons le cas des médias pro-terroristes (IV). Un lien intrinsèque Le terrorisme a un impact à la fois sur l'acte perpétré (les pertes matérielles, humaines . mais surtout sur le symbole qu'il représente et qui, lui, va perdurer au-delà des dommages et des réparations matériels. [...]

[...] L'information circule dans un entre-soi idéologiquement conquis. Enfin, si la volonté des médias pro-terroristes est de conforter l'identité du groupe, les médias pro-terroristes vont organiser une mise en scène de l'information. Moscovici parle d'« orchestration » : « ( . ) une modalité d'expression d'un groupe en situation conflictuelle et d'élaboration instrumentale, en vue de l'action, de la représentation qu'il se fait de l'objet du conflit ». Le terroriste se trouve alors légitimé par le reste du groupe, c'est-à-dire les récepteurs de l'information spectacularisée. [...]

[...] Là encore, la diffusion de cette réaction par les médias est un phénomène anticipé par le terroriste pour faire parler de sa cause et faire plier le politique. Ainsi, la relation médiatique est déjà contenue dans l'acte terroriste avant même sa réalisation. Une propension commune à la spectacularisation Terroristes et médias ont en commun de vouloir faire de l'événement un « spectacle », quelque chose qui se donne à voir. Les uns passent à l'acte, les autres le diffusent. Dès lors, une rhétorique de la « mise en scène » (Mannoni et Bonardi) est perceptible chez ces deux acteurs, car les médias deviennent eux aussi acteurs de cette propagation. [...]

[...] Les conséquences sont nombreuses sur le public. La société assiste à une désorganisation psychologique qui se fait jour, un bouleversement du système des valeurs qui fait perdre tout repère puisque deux représentations totalement opposées du monde s'exposent, le lien social qui s'en trouve fissuré, voire rompu parfois. Les terroristes atteignent ainsi leur objectif : manipuler l'opinion publique, du moins ses ressentis, en ayant manipulé au préalable l'organe médiatique. L'acte terroriste est alors le premier impact, mais il vaut pour ses conséquences, qui sont elles psychiques, psychologiques et marquent plus durablement encore les esprits, pris en étau par l'angoisse, l'instabilité et l'insécurité. [...]

[...] Conclusion Dès lors, le terrorisme ne se définit pas tant dans l'action matérielle qu'il a perpétrée, mais plutôt dans ses conséquences psychologiques et sociales, amplifiées par une médiatisation qu'il avait lui-même anticipées. Les médias ainsi manipulés manipulent à leur tour l'opinion publique, ce qui peut même avoir une influence sur le politique. Les médias portent donc bien leur nom de cinquième pouvoir. Faut-il pour autant faire silence sur les actions terroristes ? Ce serait là certainement abdiquer face aux idéologies extrémistes. [...]