L'originalité de l'avant-garde et autres mythes modernistes (Macula, 1993) est un recueil d'articles écrits entre 1972 et 1984 par Rosalind Krauss, critique d'art et professeur d'histoire de l'art. Ces textes constituent des prises de position originales et novatrices, permettant à la critique d'art de se dégager du fort ascendant de Greenberg. À travers ces textes, Rosalind Krauss révèle et analyse des problématiques esthétiques propres à la modernité
[...] La grille re-présente la limite démarquant l'œuvre et le monde environnant, et fait ainsi entrer cette limite à l'intérieur même du tableau. Tandis que la vision centrifuge présente l'œuvre comme le fragment d'un champ continu implicite, la vision centripète, elle, fait de l'œuvre un tout autonome et structuré. Rosalind Krauss dénonce alors un clivage établi entre la grille centrifuge et la grille centripète. La vision centrifuge proclame, selon les œuvres et à différents degrés, une continuité théorique entre l'œuvre et le monde et parfois l'idée d'organisation de la "réalité". [...]
[...] À travers ces textes, Rosalind Krauss révèle et analyse des problématiques esthétiques propres à la modernité. Ainsi, dans l'article intitulé Grilles l'auteur démontre de façon magistrale combien ce qui semblerait n'être qu'un simple motif plastique (la grille) est en fait profondément complexe et ambivalent, porteur de symboles et de paradoxes, et contient de grandes problématiques du XXe siècle. Plus loin, dans l'article l'originalité de l'avant-garde l'auteur met en regard le motif de la grille avec son implication dans la définition de "l'avant-garde" et la vision que peuvent en avoir les artistes. [...]
[...] Or Rosalind Krauss démontre que ce clivage est erroné. Des grilles centripètes peuvent tenir du matérialisme, comme celles que met en œuvre Jasper Johns, tandis que des grilles centrifuges, en prolongeant implicitement la surface, contribuent à sa dématérialisation, et tendent alors à un certain spiritualisme. Cette "schizophrénie" de la grille permet à des artistes comme Mondrian, Stella . de jouer des deux visions à la fois. La grille : une illusion moderniste Enfin, l'auteur insiste sur le fait que la grille est un motif extrêmement résistant au changement ; par sa structure, elle est antidéveloppement et antirécit. [...]
[...] Pour cela, elle fait croire qu'il est entièrement moderne, et qu'elle ne porte en elle aucun vestige spirituel du XIXe siècle. En cela, les structuralistes conçoivent le mythe comme la prise en charge culturelle de la contradiction À ce stade, quelques explications éclaircissant la vision structuraliste du mythe s'imposent pour démontrer l'organisation mythique de la structure de la grille. L'étude du mythe par le structuralisme permet de passer de l'organisation diachronique du discours à son organisation spatiale. En spatialisant le mythe, par exemple en distribuant le discours mythique de façon logique et ordonnée sur deux colonnes, les structuralistes dégagent les contradictions restées sous-jacentes derrière les tentatives de réconciliation. [...]
[...] Cependant, la fenêtre symboliste est issue d'une vision moderniste. Tout comme la grille, elle est ambivalente : elle est objet transparent, qui laisse passer la lumière (l'Esprit) pour éclairer une pièce obscure, et elle est objet réfléchissant, le miroir qui fige, la glace (la glace qui fait à la fois référence au liquide, et donc à la naissance, et au gel, qui renvoie à la mort). Les barreaux, indissociables de la fenêtre, la matérialisent en la rendant visible ; ils sont une métaphore de l'œuvre symboliste. [...]
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