Nicolas Poussin (1594-1665) était un peintre français. Dans son oeuvre on retrouve une clarté, un équilibre, une logique et un dessin propre au style classique dont il est l'un des fondateurs. Le paysage avec Orphée et Eurydice est un tableau intrigant réalisé pour Jean Pointel, l'un des amateurs d'art ami de Poussin. On le date de 1650 environ.
Endommagé, il a été coupé du haut de 22 cm puis a été allongé en bas de 5 cm et aujourd'hui fait 124cm x 200 cm. Louis XV l'acquiert en 1665 du peintre et amateur d'art Branjon. Le tableau présente les personnages du mythe, petits face à une nature imposante qui occupe une très grande place dans le tableau.
Expliquons l'importance du paysage et qu'est-ce qu'il apporte au mythe d'Orphée et Eurydice.
[...] Poussin semble avoir pris le château de Saint-Ange à Rome pour modèle. On peut y voir accroché un vêtement rouge vif et 2 carquois. Ils appartiennent à la nature morte juste en dessous qui montre que la cérémonie des noces vient de s'achever. Entre le château et la scène mythique, des individus nus ou se déshabillant vont nager. D'autres amarrent un bateau. Tandis que la végétation, abondante dans ce tableau, affiche des ombres inquiétantes, une lumière presque féerique donne à la scène un air de dignité classique. [...]
[...] Les vastes zones d'ombre des arbres encerclent la scène, et on observe impuissant l'action : la nature a le contrôle sur le groupe de personnages, et on voit avec les scènes secondaires du paysage comme une anticipation sur le temps : le drame est isolé par le temps qui le rendra mythe. La mort d'Eurydice nous apparait alors comme inéluctable, et ne pas être important au niveau universel. Tragique : Orphée, lui-même pouvant dompter la nature par sa musique, n'a pu anticiper les dégâts faits à sa femme par la nature. On trouve chez Poussin en effet l'idée d'une nature mystique dont les mythes païens sont les aspects. La faune parfaite de Poussin n'est plus alors un simple décor au drame, mais symbole d'harmonie universelle. [...]
[...] Ainsi, il choisit le moment de la morsure du serpent, très rare (on préfère souvent la descente aux enfers) 3 Iconographie du tableau de Poussin On identifie Orphée jouant de la lyre sereinement ainsi que les deux naïades qui accompagnent Eurydice (Chez Ovide) : elles écoutent le poète. Ce personnage au centre semble être Hymen, dieu du mariage en manteau blanc sur sa robe rouge, arborant une expression neutre. La morsure d'Eurydice par le petit serpent semble avoir eu lieu : le serpent s'en va. [...]
[...] D'autre part, cette composition nous donne le sentiment d'un schéma intemporel, quelque peu pessimiste, d'un Nicolas Poussin vieillissant. Du tableau émane une certaine fatalité, et l'événement qui se déroule sous nos yeux semble déjà avoir eu lieu. L'artiste à la fin de sa vie, est obsédé de l'homme et son destin, et il faut pour lui être conscient de la mort importune qui peut arriver à tout moment. On retrouve cette pensée dans ce tableau : la mort fait irruption de manière soudaine dans un cadre idyllique. [...]
[...] A travers le mythe d'Orphée et d'Eurydice, il dresse le schéma d'un plan universel, incarné par l'immense et l'immuable nature qui semble observer le drame, étranger. Plutôt que de concrétiser le pouvoir divin, c'est ici le paysage tout entier qui l'incarne, et celui-ci s'illustre dans sa position neutre par rapport au drame, sans oublier son rôle structurel utile à l'harmonie de l'oeuvre. De cette façon, Poussin préfère illustrer le mythe d'Orphée et Eurydice par le silence alors que d'autres y useront l'éloquence. [...]
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