Le Tintoret (1518-1594), de son vrai nom Jacopo Robusti, est un peintre vénitien de la Renaissance. En opposition avec la Haute Renaissance et ses règles d'imitation de la nature, il appartient au courant maniériste de son temps. Elève de Titien, il est réputé pour avoir dépassé son professeur dans la maîtrise des couleurs et des ombres, ainsi que du rendu de la matière, s'inscrivant alors parmi les grands du style vénitien. D'une grande admiration pour Michel-Ange, il en a été fortement influencé dans sa technique du dessin. En 1548 il obtient la maturité et le succès. C'est à cette période qu'il peint le tableau intitulé Mars et Vénus surpris par Vulcain, que certains appellent Vénus, l'Amour et Vulcain. Peinte vers 1551, cette huile sur toile de 134 centimètres de hauteur sur 198 centimètres de long est conservée à la Alte Pinakothek à Munich.
On ignore tout des origines et conditions d'élaboration du tableau. Les sujets tirés de la mythologie ont rarement été traités par le Tintoret. Il préfère les sujets religieux ou la célébration des succès politiques de Venise, qu'il a largement traités. C'est donc avec une application toute particulière qu'il s'est consacré à cette toile de Munich. On y connaît d'ailleurs un dessin préparatoire, un des très rares exemples graphiques de composition (on trouve plutôt des préparations de figures isolées chez Le Tintoret).
[...] Les deux poètes nous racontent que la femme de Vulcain, Vénus, était infidèle à son mari, amoureuse de la beauté de Mars. Le soleil (Apollon) l'apprit et le signala à Vulcain, qui prépara un piège et les surprit tous les deux au lit. On comprend alors que la femme allongée est la déesse Vénus, sur qui est penché son mari Vulcain, et Mars se cache de la colère du dieu du feu sous la table. L'enfant endormi est alors Cupidon, dieu de l'amour. [...]
[...] La femme nue dans le tableau n'est pas ce qui pose problème à elle seule. En effet, pour les tableaux qui traitent de la mythologie, il est très courant à l'époque que l'on peigne des femmes nues. Cette nudité étant ainsi devenue presque banale en peinture, l'Église va commencer à s'en préoccuper à partir de 1550. Cependant, il s'agit ici d'une Vénus, et selon les conventions elle peut être représentée nue. Ce qui pose alors problème ici c'est la façon dont elle est traitée. [...]
[...] Mars et Vénus surpris par Vulcain est une peinture très élaborée qui a suscité beaucoup de polémiques entre les historiens de l'art. Cette œuvre très intéressante nous renseigne sur les convenances de l'époque, et comment celles-ci étaient transgressées. Le Tintoret était un maître en son art, et il nous le prouve une fois de plus. D'ailleurs, il me semble que le titre dernièrement cité est plus pertinent que celui de Vénus, l'Amour et Vulcain, car ce dernier semble paisible et fécond, alors que tout le jeu du tableau se fonde sur le mouvement de surprise ainsi que le ridicule de la situation. [...]
[...] Or dans le reflet, sa position a fait verser Mars et Vénus surpris par Vulcain, détail beaucoup d'encre. Daniel Arasse pense qu'il s'agit d'une position différente : dans le miroir ( Vulcain semble avoir aussi le genou gauche (devenu son genou droit dans le reflet) posé sur le bord du lit Et en effet, sur le reflet, ses deux genoux se retrouvent à la même hauteur. De plus, là où dans la scène, le pied droit de Vulcain est à la hauteur de son genou gauche, dans le reflet on voit les deux genoux, mais aucun pied, caché par l'étoffe de couleur rouge posée sur la table. [...]
[...] Les cheveux d'or, la coiffure ainsi que la peau sont étonnement ressemblant. Cependant, la lumière y est traitée tout à fait différemment. En effet, là où elle était plutôt diffuse de manière constante sur le corps de la déesse de Titien, elle est répandue en rayons croisés sur celui de la Vénus de Tintoret, jouant sur les effets d'ombres, là où notre peintre est maître en son art. Cette lumière attire notre regard vers la gauche du tableau, là où se passe la scène, entre Vénus, Vulcain et Cupidon, où elle est particulièrement abondante (voir schéma sur le calque, lignes jaunes). [...]
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