Cet exposé propose d'étudier la façon dont les Japonais appréhendent le thème du corps humain, en particulier du nu, au XXème siècle, dans une société emplie de contradictions entre tradition et modernité, tabous sociaux anciens et conceptions occidentales nouvelles. Quelle a été l'évolution de la photo de nu, et plus largement de l'art photographique au Japon, depuis son invention au début du XXème siècle ? Cette évolution a-t-elle permis, en parallèle, de modifier la façon dont la société japonaise appréhende le corps humain, et plus particulièrement, le sujet du nu ?
[...] Cependant, cela ne se voit pas instantanément : ainsi SHINOYAMA joue-t-il avec le pouvoir des mots et de la légende sur l'image ; le spectateur lit le titre et prend l'image telle quelle, sans s'apercevoir tout de suite de la supercherie. Le titre permet également de créer un malaise, car il transforme une photo certes provocante pour l'époque (homosexualité féminine sous-jacente) en réel tabou universel (inceste). L'étude du nu est très poussée dans cette série : les poses sont très travaillées et n'ont rien de naturel. [...]
[...] En effet, la morale japonaise est avant tout fondée sur le concept d'immanence, et cherche à domestiquer les sentiments humains. Cependant, elle ne cherche pas à les réprimer ; ainsi le plaisir n'est-il jamais condamné, et il existe une certaine tolérance à l'égard des sens : le sexe est certes contraint, mais il n'est pas source de culpabilité. A la période d'Edo par exemple, l'art de la prostitution a développé une véritable esthétique, reconnue et acceptée, même si elle ne pouvait quitter le cadre des quartiers de plaisir. [...]
[...] Il n'est plus seulement un humain, il est, au-delà de lui-même, un témoignage, une preuve accablante de ce qu'a engendré le feu des bombes atomiques : oreille mutilée, visage et cou brûlés, défigurés. La guerre est passée et a fait d'un homme sain, normal, un monstre. A cette réalité se superpose la vision et la volonté personnelles de TOMATSU, qui choisit par exemple de ne montrer ni le visage, ni le regard de l'homme : pas d'apitoiement inutile, la blessure suffit à dépeindre la gravité de la situation. [...]
[...] C'est seulement dans l'acte sexuel que j'expérimente le corps masculin dans une vraie voie. Mais cela signifie-t-il que je le perçoive pleinement ? Après tout, ce n'est qu'une expérience passive. Dans la ville également, nous rencontrons le corps masculin moins souvent que le corps féminin. Il y a peu d'opportunités de l'observer de façon rapprochée. Je voulais observer le corps masculin dans ses moindres détails. Je suis donc allée au plus près de la peau masculine, comme si la lentille de l'objectif était en train de le toucher, le lécher. [...]
[...] Ainsi, j'ai photographié quelques douzaines de personnes âgées nues. Après sélection, j'ai retenu seulement quelques photos de femmes âgées, d'environ 90 ans. J'ai pensé que ces images représentaient parfaitement le dernier corps physique d'un humain qui n'est que vanité. (YAMANAKA Manabu) Sur un thème différent à la base, YAMANAKA parvient à susciter chez le spectateur une réflexion et une émotion assez proches de celles provoquées avec la série Jyôdo : tout d'abord, dégoût pour ce que le photographe nous montre à voir de ces femmes âgées, puis émotion intense pour ces êtres qui s'accrochent à cette enveloppe charnelle usée, qui menace de rompre et de disparaître. [...]
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