Le peintre et sa représentation dans la peinture du XIXe siècle

Résumé du document

Ce dossier tente de répondre à un ensemble de questions : "Que dévoile l'artiste dans le reflet de son image ? Que dévoile-t-il, lui qui semble nous regarder alors qu'en réalité il scrute son propre reflet dans le miroir ? En se peignant ou en se faisant portraiturer, comment l'artiste met-il en scène la création artistique ? Quel rôle donne-t-il à la peinture par rapport aux autres formes d'art et par rapport à la réalité ? Comment le peintre inscrit-il sa propre image dans l'histoire de l'art ?"

Cette étude est divisée en 7 parties : l'artiste et sa palette / l'artiste romantique / le portrait de l'artiste travesti / autoportrait et perte de soi / la femme artiste / l'atelier / les tableaux d'artistes.
Les illustrations de l'ensemble des oeuvres citées sont mises en annexe. Une bibliographie très complète est jointe.

Extraits

[...] Les femmes ont attendu longtemps avant de trouver leur place dans le monde de l'art, et c'est seulement au cours des vingt dernières années du XIXe siècle qu'apparaît un nouveau type d'autoportrait qui présente le sérieux et l'application du peintre. Les femmes se décrivent alors à leur chevalet, vêtues de blouses ou de tabliers, serrant leurs pinceaux et profondément concentrées. Ce sérieux est symbolisé par leur palette qui est souvent mise en valeur et démesurément grande. La peintre hollandaise Thérèse Schwartze (1851-1918) est représentative de cette nouvelle génération de femmes artistes sûres d'elles. Dans son Autoportrait (1888, huile sur toile, Florence, Galeria degli Uffizi) elle montre son mépris de la coquetterie des courants précédents en conservant ses lunettes. [...]

[...] Les visages expriment alors souvent un trouble et une inquiétude de plus en plus profonds. Vincent Van Gogh (1853-1890) est l'un de ces peintres dont les tableaux sont le miroir fidèle de son univers intérieur tourmenté et de son impossibilité d'établir un rapport réel avec le monde extérieur, il dénonce la solitude et l'impuissance de l'homme à l'égard de la vie. L'Autoportrait à l'oreille coupée de 1889 (huile sur toile, 51×45 cm, collection particulière) le représente en homme blessé avec un pansement ostentatoire sur l'oreille gauche suite à son auto-mutilation. [...]

[...] Le sujet de ce tableau n'est cependant pas Zola mais une nouvelle conception de la peinture qui s'impose grâce à lui. L'écrivain, posant dans l'atelier de Manet, est réquisitionné pour donner encore plus de poids à son apologie du peintre suite aux virulentes critiques provoqué par Olympia (une représentation est affichée dans le cadre dans l'angle supérieur droit) mais c'est aussi un remerciement pour cette prise de position. Le modèle est mis en scène dans un univers destiné à rappeler des activités et des goûts qui représentent plus ceux du peintre que de l'écrivain. [...]

[...] Fantin-Latour se représente palette en main et dans l'exercice de son travail dans un décor réduit à l'essentiel. Grand format, composition savante dans un espace complexe, tout porte à croire que Gustave Caillebotte (1848-1894) voulait faire de son Portrait de l'artiste au chevalet (vers 1879-1880, huile sur toile 115 cm, collection particulière) une version moderne du peintre dans son atelier, un thème qui n'a cessé de hanter les artistes. L'œuvre est inachevée. Caillebotte s'y présente en peintre vêtu d'un costume d'intérieur sans la moindre fantaisie, le pinceau à la main devant une toile en train c'est-à- dire sans cadre, ce qui laisse supposer qu'il travaille vraiment et ne pose pas. [...]

[...] L'œuvre est plutôt un témoignage intemporel d'une amitié étroite. Conclusion La pratique de l'autoportrait est sans doute l'une des grandes questions que le peintre est amené à se poser face à son art, à ses vertus, comme pour tester son pouvoir. Son apparence ne peut lui suffire, c'est l'être intime qu'il cherche à transcrire. Une sorte d'image située entre le reflet du visage dans une glace et l'interrogation de son inconscient, la projection de l'idée que l'on se fait de soi. [...]